La sélection néerlandaise s’annonçait comme la nation à battre sur ce championnat du monde sur les monts brabançons. Elle a finalement connu la défaite au bout d’une course souvent menée à contre-temps par les favorites, pendant que l’Italie agissait comme une seule femme pour envoyer la sprinteuse Elisa Balsamo au pied de l’arc-en-ciel, comme en 2016 chez les juniores !
Disposer des meilleures performeuses du peloton ne garantit pas d’un succès prestigieux dans le peloton professionnel. Le physique est évidemment un élément déterminant pour lever les bras au bout de l’épreuve la plus ardue de la saison, il n’est toutefois rien sans la tactique, le sens de l’observation, le collectif… Autant de critères qui permettent à une nation de croire en un titre mondial malgré une position d’outsider. Avant le départ de ce championnat du monde sur les routes flamandes, la sélection des Pays-Bas prenait une nouvelle fois une position de favorite trois étoiles pour un maillot irisé qui n’échappe plus aux professionnelles néerlandaises depuis 2017. Encore fallait-il éviter le fiasco des récents Jeux Olympiques, course durant laquelle les mêmes représentantes bataves avaient manqué de cohésion et de communication pour revenir sur l’Autrichienne Anna Kiesenhofer. Alors, sur cette course mondiale, l’objectif était simple : contrôler au maximum et éviter toute offensive au long cours. Aucune attaquante ne parvenait à prendre plus d’une minute d’avance sur le peloton, au complet pour entamer la phase finale de ce Mondial, entre les circuits de Louvain et d’Overijse.
Van Dijk : « Difficile de s’échapper »
Même sur le circuit « flandrien », le plus rude avec ses côtes abruptes et pavées, les Néerlandaises restaient à l’avant, mais au chaud, alors que la principale accélération émanait de la Sud-Africaine Ashleigh Moolman-Pasio sur la deuxième ascension du Smeysberg. Les Néerlandaises semblaient alors hésiter : Ellen van Dijk, Annemiek van Vleuten ou encore Demi Vollering enchaînaient les offensives sans vraiment persévérer en voyant d’autres nations les rejoindre, alors que Marianne Vos et Chantal van den Broek-Blaak semblaient suivre et patienter jusqu’au circuit louvaniste. Les attaques bataves ne cessaient quasiment pas dans le final, même lorsque la Française Aude Biannic ou l’Espagnole Mavi Garcia essayaient de s’isoler en tête. Mais à chaque fois, les coureuses en orange semblaient s’attaquer l’une et l’autre, sans vraiment déterminer de leader dans ces derniers kilomètres. Et ce malgré le fait que Marianne Vos, connue pour sa pointe de vitesse, suivait aisément les attaques des plus explosives dans les côtes de Louvain.
« C’était une course difficile, très tactique et quelque peu chaotique dans le final« , confie Annemiek van Vleuten, l’une de ces coureuses qui a oscillé entre attaquante et équipière-modèle dans ces derniers tours. « On ne savait pas trop si un groupe pouvait sortir, on suivait comme on pouvait », dit l’ex-championne du monde. « Il était très difficile de créer un écart et de s’échapper », ajoute Ellen van Dijk, encore à la planche après le dernier passage dans le Wijnpers, sans toutefois mener des relais très probants dans les derniers kilomètres malgré la présence de Vos dans sa roue. Les deux Néerlandaises étaient alors avec Katarzyna Niewiadoma, Anna Henderson et Alison Jackson en tête, et avaient donc une chance idéale de placer Vos, meilleure sprinteuse du lot, en bonne position dans l’ultime ligne droite. Mais encore une fois, cela a hésité…
Van Vleuten : « Un parcours pas assez dur »
« J’ai été un peu déçue par le parcours, mais c’est bien aussi d’avoir ce type de tracé pour une fois. Ce n’était pas assez dur pour piéger certaines, comme Elisa Balsamo. Nous aurions dû suivre davantage, même si j’estime que nous avons réalisé une bonne course. On n’a juste pas réussi à gagner ce sprint avec Marianne (Vos), même si nous avons donné le meilleur pour l’emmener au sprint », estime Van Vleuten. Certes, dans les deux derniers kilomètres, les Néerlandaises ont enfin semblé courir ensemble pour mener Vos. Mais même dans la dernière ligne droite, elles ne roulaient pas collectivement autour de la sprinteuse batave, la laissant se débrouiller face à des Italiennes mieux lancées avec Elisa Balsamo dans la roue d’Elisa Longo Borghini aux 300 mètres. Et sur le sprint final, en faux-plat montant, la jeune sprinteuse de 23 ans a eu raison de sa rivale d’onze ans son aînée !
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En pleurs durant de longues minutes, la multiple championne d’Europe sur piste et ex-championne du monde sur route chez les juniores prenait le temps de retrouver ses esprits avant d’aller chanter « Fratelli d’Italia », toute d’arc-en-ciel vêtu, avec ses équipières. « C’est un rêve pour moi, surtout après une si longue saison. Toute l’équipe a été si, si bonne. Sans eux, cette victoire n’aurait pas été possible. Leur lancement était parfait. J’étais en pleine confiance et après le dernier virage, j’ai éteint mon cerveau pour tout donner », confie Elisa Balsamo, qui a usé de son expérience de pistarde pour bien lancer son dernier effort derrière Longo Borghini et ainsi conserver son avantage sur Vos, pour la sixième fois de sa carrière en deuxième place d’un championnat du monde…
Van Dijk : « Tout le monde n’était pas à sa place »
« Cela aurait pu être un meilleur lancement, c’est certain. Mais Balsamo était très forte. Après coup, vous vous dites que vous auriez dû faire les choses différemment. Je me suis rapproché d’elle, mais je ne l’ai jamais dépassée. C’est triste d’être si proche, et en même temps si chouette d’être sur le podium », confie Vos, entre deux eaux. Alors qu’Ellen van Dijk confirmait que les Pays-Bas n’avaient pas forcément opté pour la meilleure tactique de course. « Notre plus grande chance de victoire était avec Marianne, mais le lancement du sprint n’a pas été assez bon. Je pense que tout le monde n’était pas présent à sa place. Nous allons devoir en discuter », indique la championne du monde du contre-la-montre.
Pendant que côté italien, on salue une course collective, parfaitement gérée pour rentrer sur les attaques quand il fallait et protéger Balsamo jusqu’au dernier moment. « J’ai juste fait mon travail », sourit Elisa Longo Borghini, leader annoncée qui sait sacrifier dans le final pour faire briller Balsamo. « Dès le départ, je sentais qu’Elisa pouvait gagner aujourd’hui. On pensait que les Néerlandaises allaient être plus agressive. Finalement, c’était surtout une course de contrôle jusqu’aux deux derniers tours du circuit final. Là, je savais que je devais boucher tous les écarts et placer Elisa le plus proche possible de la ligne d’arrivée ». Et cela a fonctionné parfaitement pour les Italiennes.
Kopecky : « Je me suis cassé les jambes »
Dans le clan belge, la déception pouvait se lire sur le visage de Lotte Kopecky, outsider sur ce circuit belge. Mais la sprinteuse n’a pu reprendre son souffle dans le dernier tour : coincée dans la dernière montée du Wijnpers, elle n’avait plus la force pour tenter le sprint final dans le groupe de tête. « J’ai eu du mal à me positionner correctement et je me suis cassé les jambes à essayer de remonter puis d’accrocher le wagon arrière… », explique-t-elle sur le plateau de la VRT. « Donc à 2,5 kilomètres de la fin, je savais déjà que c’était fini. J’étais trop loin et je n’ai pas réussi à remonter comme je voulais ». Elle termine finalement 16e malgré le bon travail de ses équipières, dont Jolien d’Hoore, qui disputait son dernier Mondial. « J’ai essayé de travailler le plus possible pour Lotte. Le fait que j’ai pu encore combler l’écart sur les attaquantes à 20 kilomètres de la fin a été important. Mais le parcours était usant. Vous pensez que vous n’avez pas encore épuisé vos forces, mais cela change rapidement à l’arrivée à Louvain. Surtout le Wijnpers qui est bien rude. On sent chaque pourcent. Et cette dernière ligne droite est en faux-plat. C’est pour les sprinters puissants, pas pour les plus rapides », estime D’Hoore, qui confirme que ce championnat du monde est bien plus rude qu’annoncé.
Belgium says goodbye to @JolienDhoore. #Flanders2021 was her last race on home soil. A massive crowd payed tribute to a true champion #belgiancycling pic.twitter.com/YqEUPCLsHr
— Belgian Cycling Team (@BELCyclingTeam) September 25, 2021
Résultats de la course élites femmes des championnats du monde de cyclisme sur route 2021 (Anvers > Louvain, 157.7 km) :
- Elisa Balsamo (Ita) en 3h52:27
- Marianne Vos (P-B)
- Katarzyna Niewiadoma (Pol) à 0:01
- Blanka Kata Vas (Hon)
- Arlenis Sierra (Cub)
- Alison Jackson (Can)
- Cecilie Uttrup Ludwig (Dan)
- Lisa Brennauer (All)
- Coryn Rivera (USA)
- Ashleigh Moolman-Pasio (Afs)
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Photo : capture Eurosport
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