L’attente s’annonce intense : dans plus de 260 jours, le premier Tour de France Femmes sera sur les rails pour un peloton féminin qui attendait une telle épreuve depuis trente ans. Après le Giro (organisé par un autre comité que RCS Sport) et la Vuelta (également menée par ASO), une course par étapes d’envergure voit enfin le jour en parallèle au Tour de France masculin. Si elle ne fait actuellement que huit jours, cette épreuve propose pour sa première édition un parcours complet qui augure un avenir intéressant pour cette course qui aura un impact médiatique bien plus important grâce notamment à son départ, le même jour que la dernière étape masculine du Tour.
Huit ans après la création de La Course by le Tour de France, course d’un jour sans véritable attrait, le Tour de France Femmes va enfin devenir réalité. L’idée était en chemin depuis une dizaine d’années, avec les demandes répétées de championnes féminines comme Marianne Vos, Emma Pooley, Chrissie Wellington et Kathryn Bertine de construire un Tour féminin, afin d’établir un calendrier équitable entre les hommes et les femmes. C’est finalement en 2022 que ce Tour destiné aux femmes va prendre son envol, plus de trente ans après la dernière édition d’une première mouture de cette course, imaginée entre 1984 et 1989 par ASO. Cette fois, ce Tour aura des allures bien plus imposantes avec des dates distinctes (seule la première étape du Tour Femmes se déroulera le même jour que la dernière étape du Tour Hommes), une présence médiatique plus importante et surtout, une professionnalisation bien plus avancée.
Des chemins de vigne inédits
Le parcours de ce premier Tour de France Femmes était attendu avec impatience, surtout au lendemain de l’annonce de la nouvelle directrice de l’épreuve, Marion Rousse, ex-championne de France qui a déjà fait ses gammes comme organisatrice à l’occasion du Tour de la Provence (dans le calendrier masculin, cette fois). Et ce tracé ne déçoit pas. Sur plus de 1 000 kilomètres et huit étapes entre Paris et les Vosges, les coureuses vont affronter des étapes de tous types. La plaine dès le départ avec les premières étapes à Paris et sa banlieue. Les vallons à l’occasion d’une étape en Champagne entre Reims et Épernay, sur les mêmes côtes qui avaient permis à Julian Alaphilippe de se parer de jaune en 2019. Les chemins de gravier dans les vignes de l’Aube à l’occasion de la 4e étape menant à Bar-sur-Aube, avec six montées et quatre chemins non-macadamisés dans les 60 derniers kilomètres.
Et enfin la montagne à l’occasion des deux dernières étapes qui feront la part belle aux grimpeuses dans les cols d’Alsace et des Vosges. L’avant-dernière journée de course mènera les cyclistes sur le Petit Ballon d’Alsace (9,3 km à 8,1% de moyenne), le difficile col du Platzerwasel (7,1 km à 8,3%) et le Grand Ballon (13,5 km à 6,7%) avant l’arrivée au Markstein, soit l’étape la plus rude de cette semaine française. La dernière étape sera plus intense dans son final avec la montée inédite de la Super Planche des Belles Filles, comme sur le Tour masculin, avec ses 7 km à plus de 8,7% de moyenne et son dernier kilomètre sur des graviers et des passages à plus de 20%.
Un premier test mais…
« Oui, il s’agira bien d’une première, même si d’aucuns ont en mémoire les épiques duels des années 1980, quand Jeannie Longo finit par l’emporter face à Maria Canins, trois Tours féminins à deux ! Mais ces pionnières couraient alors en une sorte de prologue à la course des hommes », rappelle Marion Rousse. « Cette nouvelle épreuve, elle, vivra sa propre vie et gardera allumés les projecteurs du Tour pour une semaine d’intense bataille. Appelé à s’inscrire dans un temps long et irréversible, à sécréter et pérenniser ses propres exploits et ses profondes émotions, ce rendez-vous estival est entouré des plus vives attentions et de l’accompagnement des partenaires majeurs et historiques du Tour« . Et c’est ce qui peut permettre à cette épreuve de connaître une plus longue vie, et d’apporter une attention médiatique encore plus grande au cyclisme féminin, qui connaît depuis la dernière décennie une évolution croissante vers un calendrier plus étoffé, des courses plus intenses, une présence télévisuelle plus importante. Tout ce qu’il faut pour amener les partenaires et pousser ces sportives vers le plus haut niveau.
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Cette première édition est évidemment un test pour l’ensemble du peloton. Et comme le rappelle Audrey Cordon-Ragot (Trek-Segafredo), cette expérience d’égalité ne doit pas faire oublier que les effectifs des équipes féminines sont réduits (jusqu’à 15 coureuses), et que le calendrier devient de plus en plus large, avec quatre Grands Tours (Tour de Grande-Bretagne, Giro Donne, Tour de France Femmes et la nouvelle Battle of the North, en Norvège). Mais pour celles qui se sont battues pour cette organisation, ASO peut encore aller plus loin. Si la 5e étape dépasse la barre des 160 kilomètres, normalement le maximum permis par l’Union Cycliste Internationale pour une course professionnelle féminine, Kathryn Bertine estime pour Cyclingnews que le Tour de France Femmes aurait pu tenter une étape de près de 200 km. « Même si je comprends que les courses plus courtes offrent souvent des courses plus excitantes que celles plus longues, nous devont faire attention au sexisme latent : l’UCI et ASO maintiennent cette croyance selon laquelle les femmes ne peuvent pas courir des distances égales à celles des hommes. (…) Je ne dis pas que toutes les courses doivent faire 200 km. Je dis que si une étape est équivalente à ce que les hommes font, on ferait un grand pas en avant vers l’égalité », estime-t-elle.
Des gains plus importants
Ce commentaire n’empêche pas les cyclistes de confirmer leur intérêt et leur satisfaction par rapport au parcours proposé, qui dévoile un profil très complet, avec en prime des nouveautés (les chemins de vignes) par rapport au Tour masculin. Les discussions autour du prize-money, dont les différences sur Paris-Roubaix ont encore relancé le débat sur l’équité hommes-femmes, sont également positives. La plupart des coureuses saluent le fait que l’organisateur a décidé de mettre en place un pot de récompenses de 250 000 euros, soit le plus large proposé sur le circuit cycliste féminin. Plus important que les autres courses masculines de huit jours organisées par ASO (près de 140 000 euros pour Paris-Nice et le Dauphiné). Il reste désormais à espérer que la diffusion télévisée ne sera pas limitée à moins de deux heures, comme les précédentes courses organisées par ASO, pour permettre de découvrir à quel point le peloton féminin peut délivrer des courses surprenantes, et ainsi faire grandir le public autour de ces courses !
La carte générale de la 1re édition du Tour de France Femmes :
Les étapes de la 1re édition du Tour de France Femmes :
1re étape – Dimanche 24 juillet 2022 : Paris/Tour Eiffel > Paris/Champs-Élysées (82 km)
2e étape – Lundi 25 juillet 2022 : Meaux > Provins (135 km)
3e étape – Mardi 26 juillet 2022 : Reims > Épernay (133 km)
4e étape – Mercredi 27 juillet 2022 : Troyes > Bar-sur-Aube (126 km)
5e étape – Jeudi 28 juillet 2022 : Bar-le-Duc > Saint-Dié-des-Vosges (175 km)
6e étape – Vendredi 29 juillet 2022 : Saint-Dié-des-Vosges > Rosheim (128 km)
7e étape – Samedi 30 juillet 2022 : Sélestat > Le Markstein (127 km)
8e étape – Dimanche 31 juillet 2022 : Lure > La Super Planche des Belles Filles (123 km)
Photo de couverture : ASO/Fabien Boukla – Infographies : ASO/Geoatlas.com
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