Tous les ingrédients d’une guerre des chefs étaient prêts, les premières accélérations dans le sable annonçaient une heure à haute intensité… Puis une crevaison a tout bouleversé. Mathieu Van der Poel a monté en gammes, alors que Wout van Aert ne retrouvait plus le bon rythme. Et sur la plage ostendaise, cela se paye cash. Mathieu Van der Poel a conquis en bord de mer son quatrième titre mondial, le troisième consécutif. Un avantage pour 2021 ? La route sera d’un tout autre ressort.
Ce championnat du monde en terres belges annonçait un duel de haut vol entre Wout van Aert et Mathieu Van der Poel, vu leur domination du circuit professionnel depuis leur retour dans les labourés, fin novembre pour l’un, début décembre pour l’autre. Les deux stars de la discipline s’étaient déjà affrontés à couteaux tirés sur les épreuves de Coupe du monde, ils étaient désormais attendus pour l’épilogue sur un circuit particulier, autour de la plage d’Ostende. De la technique dans le sable, de l’explosivité sur le pont artificiel séparant la mer de l’hippodrome, et de la puissance sur les chemins boueux de l’hippodrome ostendais : les coureurs complets que sont Van Aert et Van der Poel allaient apprécier.
Dès les premiers tours de roue, le duel prenait forme. Wout van Aert prenait le meilleur départ à la sortie du pont, et confirmait qu’il était dans les trajectoires ensablées, le coureur le plus adroit. Il imposait son rythme à Mathieu Van der Poel, seul coureur capable de tenir son rythme au bout d’à peine un demi-tour de course. Pendant que Toon Aerts, Laurens Sweeck, Michael Vanthourenhout et autre Eli Iserbyt jouaient déjà des coudes pour… la troisième place.
Une chute contre une roue crevée
Le champion du monde en titre se faisait tout de même peur sur l’hippodrome, réalisant un petit soleil, sans conséquence physique toutefois. « J’ai été surpris par cette trace dans la boue. C’était assez profond, et je n’avais pas l’impression de tomber sur un trou à cet endroit-là. Mais cela a permis à Van Aert de prendre l’avantage », évoque après coup le Néerlandais, contraint de céder quinze secondes à son rival belge après seulement deux tours de course.
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Il restait encore trois quarts de course, le jury décidant de n’accorder que huit tours aux hommes, augurant moins d’une heure de course. Bien peu pour la course la plus importante de l’hiver. Qu’importe : la course n’en serait que plus intense, annonçaient les commentateurs en direct d’Ostende. Et pourtant, dans le troisième tour, Wout van Aert se retrouvait comme collé à la terre. Van der Poel, en retrait jusqu’alors, revenait comme un boulet de canon sur le Belge avant de le dépasser et de réaliser une accélération dont il a le secret. Que se passait-il donc pour le coureur de Herentals ? La caméra montrait enfin, près de la ligne d’arrivée, la roue avant de l’ancien leader… « Je pense que j’ai crevé près du poste technique, juste après la ligne d’arrivée », explique Van Aert au micro de Sporza. « Le pneu n’était plat tout de suite, cela ressemblait à une crevaison lente. Soit. J’y ai perdu une demi-minute ».
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« La crevaison a gâché mes chances »
Après avoir pris l’ascendant psychologique face à Van der Poel, qui semblait jusque-là fébrile avec quelques fautes techniques en plus de sa chute, Van Aert devait désormais cravacher pour revenir en tête. « J’ai pu le dépasser dans la section la plus décisive du circuit. C’est avant le pont que vous pouviez vraiment faire la différence », explique Mathieu Van der Poel au micro de Sporza. « J’étais dans la situation que je souhaitais, mais la crevaison a finalement gâché mes chances », réalise après coup Wout van Aert. S’il revenait à moins d’une dizaine de secondes de la première place au tour suivant, le Belge ne parvenait plus ensuite à refaire son retard. Même dans les passages dans le sable où il semblait si fort en début de course, il plafonnait face à un leader qui retrouvait ses jambes de début de saison.
« Je m’améliorais tour après tour, et je maîtrisais de mieux en mieux le parcours. J’ai eu le sentiment de maîtriser la deuxième partie de course », réagit Mathieu Van der Poel, qui se permettait de s’imposer avec plus de 35 secondes d’avance sur Wout van Aert au bout de ces huit tours et cinquante-huit minutes de course dans le sable ostendais. « Je pense qu’après deux tours de course, on pouvait voir que j’étais très bien dans ma course. Mais la crevaison m’a coûté beaucoup d’énergie. Quelque chose s’est alors brisé au niveau mental, et je suis particulièrement déçu de cela. J’ai explosé après m’être rapproché de Mathieu… », avoue, déçu, le champion belge, deuxième d’un championnat du monde élite pour la troisième fois de sa carrière. Soit autant que son nombre de titres mondiaux.
« Mathieu mérite »
« Mathieu mérite ce titre de champion. Il a été très fort en deuxième moitié de course, je ne me suis jamais rapproché de lui », répète Wout van Aert, qui se réjouit de relancer la bagarre avec son habituel rival du Nord sur les prochaines classiques printanières. Alors que Mathieu Van der Poel confie avoir du mal à réaliser qu’il décroche ce dimanche son quatrième maillot arc-en-ciel : « C’est un sentiment bizarre, car ce n’est pas un championnat du monde normal. Sans public, sans famille, sans amis… Cela ne veut pas dire que je ne suis pas heureux de ce titre, mais il me faudra un peu de temps avant de réaliser ».
Toon Aerts sur le podium
Derrière les deux stars des labourés, Toon Aerts complète le podium après une belle bagarre avec le Britannique Tom Pidcock dans le sable. « Certains tours, je gérais bien sur la plage. Sur d’autres tours, je faisais de la m… », lâche l’ex-champion du monde espoir. « J’avais vraiment besoin d’un tel résultat », se réjouit pour sa part Aerts. « Cela a été une saison difficile, avec à chaque fois que je me sentais bien, un accident, une blessure, un coureur plus fort, le jeu d’équipe… Aujourd’hui, je suis sur le podium, tout cela est oublié », confirme le coureur de Baloise Trek Lions.
Ce dernier pourra également se dire que la saison n’est pas terminée : une manche du Superprestige et deux manches du Trophée X2O Badkamers restent à disputer ces deux week-ends prochains, et pourront permettre à ceux qui prolongent leur saison de cyclo-cross de parfaire leur palmarès. Sans Van Aert et Van der Poel, partis pour leur part vers une saison sur route bien remplie, avec les classiques printanières en vue.
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Résultats de la course des élites hommes des championnats du monde de cyclo-cross 2021 à Ostende :
- Mathieu Van der Poel (Pays-Bas), les 8 tours de 3 km en 58:57
- Wout van Aert (Belgique) à 0:37
- Toon Aerts (Belgique) à 1:24
- Tom Pidcock (Royaume-Uni) à 1:37
- Laurens Sweeck (Belgique) à 2:05
- Michael Vanthourenhout (Belgique) à 2:14
- Eli Iserbyt (Belgique) à 2:18
- Quinten Hermans (Belgique) à 2:23
- Lars van der Haar (Pays-Bas) à 2:41
- Joris Nieuwenhuis (Pays-Bas) à 3:15
- Corné van Kessel (Pays-Bas) à 4:09
- Gianni Vermeersch (Belgique) à 4:21
- Kevin Kuhn (Suisse) à 4:29
- Daan Soete (Belgique) à 4:57
- Yan Gras (France) à 5:11
- Joshua Dubau (France) à 5:28
- Tim Merlier (Belgique) à 5:34
- Zdenek Stybar (République tchèque) à 5:42
- Timon Rüegg (Suisse) à 5:50
- Curtis White (États-Unis) à 6:33
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