Strava passe au payant pour les segments : une stratégie bénéfique pour les sportifs ?

La surprise a été de taille pour les habitués de Strava : de nombreuses fonctionnalités phares passent désormais derrière un abonnement.
Logo - Strava
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La surprise a été de taille pour les habitués de l’application Strava : de nombreuses fonctionnalités phares de ce gestionnaire d’entraînements sportifs, comme les segments et les classements, passent désormais derrière un abonnement fixé à 5 euros par mois. Une hérésie ? Loin de là. L’application pourrait même gagner en efficacité avec un tel revirement.

Depuis 2009, le programme Strava, fondé par Mark Gainey et Michael Horvath, est une référence pour les cyclistes. L’application propose principalement un suivi des activités sportives via GPS, et s’est concentré sur un public de cyclistes et de coureurs à pied. Surtout, ces derniers cherchaient à se dépasser sur les « segments », ces sections créées par les utilisateurs sur une carte et permettant de comparer son temps sur un parcours donné par rapport à d’autres sportifs. Ces segments ont fait la richesse de Strava, qui était à la base… payant, et qui a décidé de proposer gratuitement les segments et classements à tous les utilisateurs après seulement un an d’existence. Qui n’a pas cherché à battre son meilleur temps sur une butte au prochain pâté de maison ou sur une côte bien connue du voisinage ? L’application permet de s’offrir quelques luttes à distance avec des cyclistes et coureurs du quartier. Ces segments ont parfois mené à des tricheries, comme ces cyclistes qui utilisaient en fait un vélo électrique ou usaient de piratage informatique pour se placer parmi les meilleurs escaladeurs du monde. Certains n’hésitaient pas à faire la chasse aux « KOM » (King of the Mountain), ce titre précieux accordé à celui ou celle (QOM, Queen of the Mountain pour les dames) qui parviendrait à réaliser le meilleur temps sur un segment donné.

Du changement pour les applications utilisant Strava

Cette lutte risque bien de paraître désuète maintenant que Strava a décidé de passer au modèle payant. Certes, le programme proposait déjà plusieurs formules d’abonnement, nommés « Summit » depuis plusieurs années, mais elles ne proposaient que quelques fonctionnalités nouvelles, comme un suivi plus précis des sorties et entraînements. Désormais, l’abonnement se veut plus fourni et inclut notamment les segments et les classements joints, la possibilité de créer et modifier des itinéraires, la personnalisation des entraînements, la lecture par ordre chronologique des activités réalisées, la comparaison des activités avec les amis etc. Désormais, une seule formule d’abonnement est proposée, fixée à 5 euros par mois, avec une période d’essai gratuite de 60 jours pour ceux qui souhaiteraient découvrir les nouveautés. Les segments restent visibles pour ceux qui souhaitent rester en mode « gratuit » mais les classements n’afficheront que les 10 premiers chez les hommes et chez les femmes, sans autre comparaison possible.

Ces changements annoncent également la décision de Strava de couper la mise à disposition de ses services aux applications de tierce-partie. Selon CyclingTips, près de 40 000 applications sur iOS, Android et autres systèmes d’exploitation utilisaient les données de Strava sur les segments et classements. Ces applications n’y ont désormais plus accès, puisque les segments passent en payant. Les segments en direct restent par contre bien actifs sur les supports de Garmin, Wahoo et autres GPS de vélo.

« Enrichir votre expérience sportive »

« Notre intention est de réinvestir directement nos revenus dans le développement de nouvelles fonctionnalités, toujours plus avancées, en nous abstenant de placer des publicités sur votre flux ou de vendre vos données personnelles. Notre mission reste de vous proposer un produit venant enrichir votre expérience sportive », expliquent Mark Gainey et Michael Horvath, fondateurs de Strava, dans une lettre développée sur le site officiel de la marque. Et c’est certainement ce qu’il faut retenir de cette nouvelle. Car Strava avait la mauvaise habitude ces dernières années d’inclure des publicités dans son application, de proposer des partenariats avec des défis sportifs aussi saugrenus qu’inintéressants, de mettre en avant ses diverses formules d’abonnement sans vraiment en faire une distinction claire. Et les bugs s’amoncelaient, entre les possesseurs d’Apple Watch et ceux qui tentaient de connecter leur ordinateur vélo de type Garmin ou Wahoo à leur application. Depuis le début de l’année, les concepteurs proposent des mises à jour techniques qui semblent corriger ces bugs, et mettent notamment en avant des partenariats techniques plus clairs avec les grands fabricants de GPS, comme Garmin. L’évolution technique est donc réelle et c’est ce chemin que la direction de Strava a visiblement décidé d’emprunter.

Romain Bardet - Strava Exemple
 

Jusqu’à présent, Strava se cherchait un modèle économique, après avoir réussi à constituer une masse critique d’utilisateurs. Avec plus de 55 millions d’inscrits, et plus de 10 millions d’activités enregistrées chaque jour (selon des chiffres dévoilés par l’entreprise fin 2018), le programme peut désormais se permettre ce passage au payant pour améliorer au mieux son service. L’objectif semble clairement de mettre en avant de nouvelles fonctionnalités pour l’utilisateur. Et non plus de mettre en avant des nouveaux partenariats pour se financer. Prendre un abonnement dans de telles conditions peut être vu comme la volonté d’aider des développeurs à améliorer leur projet. Strava doit en tout cas maintenir cette promesse s’il veut survivre dans les prochaines années. Avant même d’envisager de devenir un réseau social pour cyclistes et sportifs, comme les fondateurs l’imaginaient en 2014. Certes, les pros sont nombreux à utiliser Strava, mais la priorité n’est pas encore de s’abonner aux entraînements de Greg Van Avermaet ou Chris Froome, mais plutôt d’améliorer des fonctionnalités promises depuis longtemps.

Photo : Strava

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