Kittel et Arù parmi les stars mondiales, Roelandts ou Keukeleire dans le peloton belge, place à de nouvelles couleurs, de nouveaux défis pour cette saison 2018. Jetons un œil sur les principaux transferts qui ont animé le marché des transferts, découvrons les nouveaux looks.
Marcel Kittel (Allemagne/29 ans)
De Quick Step Floors vers Katusha-Alpecin
S’il n’a pas ramené le maillot vert à Paris, à cause d’une chute et d’une épaule en charpie, Marcel Kittel fut bel et bien le meilleur sprinter du Tour de France (5 victoires d’étape) et, par extension, de la saison 2017 (14 bouquets). Aspiré vers le sommet grâce à la culture du succès soigneusement entretenue par Patrick Lefevere chez Quick Step, l’Allemand ne s’y est pourtant pas éternisé, sentant le souffle de Fernando Gaviria lui chatouiller la nuque. Le Colombien, de six ans son cadet, incarne en effet le futur très proche. Concurrence interne que Marcel Kittel n’a pas souhaité affronter, d’autant que les recruteurs se sont pressés sur le pas de sa porte, dès l’été. Alpecin, co-sponsor allemand de l’équipe Katusha, ayant généreusement délié les cordons de la bourse, le recordman des succès au GP de l’Escaut (5) s’est laissé convaincre. À charge pour lui, désormais, de combler le vide laissé par Alexander Kristoff dans l’équipe russe.
Fabio Arù (Italie/27 ans)
D’Astana vers UAE Team Emirates
Le courant ne passait plus avec Alexandre Vinokourov, sinon en mode alternatif. Il était préférable de tirer la prise Astana. Au bout d’une saison compliquée, ternie par une sévère blessure au genou et seulement « sauvée » par un début d’été incandescent (titre de champion d’Italie puis victoire d’étape au sommet de la Planche des Belles Filles et maillot jaune en début de Tour), Fabio Arù avait besoin de respirer un air nouveau. La puissance financière d’Emirates lui offre la bouffée d’oxygène que le Sarde espérait (rachat de la dernière année de contrat et confortable salaire annuel, estimé à plus de 3 millions d’euros pour chacune des trois prochaines saisons). Sous le maillot UAE, il trouvera en Dan Martin (transfuge de Quick Step) un allié de poids mais à 27 ans, Fabio Arù fait surtout face à un challenge stressant : démontrer qu’il reste un coureur capable de remporter un grand tour (le Giro dans quelques mois ?), deux ans après son éclosion au sommet, sur les routes de la Vuelta 2015.
Alexander Kristoff (Norvège/30 ans)
De Katusha-Alpecin vers UAE Team Emirates
Le champion d’Europe n’est-il pas sur la pente descendante ? C’est l’interrogation, légitime, que les observateurs du WorldTour formulent, sur base des deux dernières saisons du Norvégien (22 victoires au total en 2016-17), moins puissant et polyvalent qu’en 2014-2015, lorsqu’il dominait les classiques (Milan-Sanremo 2014 et Tour des Flandres 2015) tout en gagnant des étapes du Tour. C’est aussi la question que le colosse de Stavanger veut balayer du revers de la main, et d’un puissant coup de jarret, en rejoignant l’équipe des Émirats. Après six saisons chez Katusha, la passion s’était érodée, la rupture de confiance était consommée. Alexander Kristoff a pu emmener Bystrom et Haller dans son sillage, afin de reconstruire un train de sprint qui file droit.
Elia Viviani (Italie/28 ans)
De Team Sky vers Quick Step Floors
Il ne sera pas le sprinter numéro 1 de l’équipe Quick Step Floors (privilège octroyé à Fernando Gaviria), il ferraillera sur les routes de son Giro plutôt qu’au Tour. Mais le champion olympique de l’omnium (Rio 2016) ne se formalise ni de l’une, ni de l’autre restriction. Trop heureux qu’il est de quitter une équipe Sky où les sprinters de pure race ne se sont jamais épanouis (demandez donc à Mark Cavendish) et de rejoindre une formation Quick Step qui cultive la victoire comme un jardinier transalpin son lopin de terre. De finisseur du subtop mondial (lauréat de la Hambourg Cyclassics, du GP de Plouay ou d’une étape du Giro 2015), le Vénétien doit franchir un palier et désormais rejoindre la caste des meilleurs sprinters mondiaux. Aidé dans cette ascension vers les sommets par son copain Fabio Sabatini, contrôleur en chef du train bleu.
Mikel Landa (Espagne/28 ans)
De Team Sky vers Movistar Team
Frustré par le compagnonnage forcé de Chris Froome sur les routes du Tour, alors qu’il s’y estimait au moins aussi affûté, le Basque a choisi de s’éloigner de l’équipe britannique, pour revenir au pays. Mais sous la nouvelle tunique Movistar, ne se sentira-t-il pas tout autant à l’étroit ? À peine arrivé en Espagne, le 4e du dernier Tour de France y a pris dans la figure les premières affirmations sentencieuses de Nairo Quintana : « Je serai le leader en France… » Malgré une évidente confiance en ses moyens et un caractère fort, le coureur originaire de Murgia a admis qu’il avait espéré un autre accueil… Entre un Nairo Quintana revanchard (12e, il a tellement déçu lors du dernier Tour) et un Alejandro Valverde que l’on dit inoxydable (il semble revenir à un bon niveau vu sa troisième place sur la plus difficile manche du Challenge de Majorque, sept mois après la grave blessure encoure lors du prologue du Tour, à Düsseldorf), Mikel Landa Meana va devoir se battre pour trouver sa vraie place.
Jürgen Roelandts (Belgique/32 ans)
De Lotto-Soudal vers BMC Racing Team
Il était en train de s’éteindre. De se fondre anonymement dans le décor, tel un vieux meuble qu’on ne distingue même plus. Jürgen Roelandts avait grand besoin de changer d’air, d’ouvrir de nouvelles fenêtres de motivation, après dix saisons d’affilée dans la maison Lotto. Le Brabançon, qui sait depuis belle lurette qu’il n’est pas un serial winner (7 victoires pros, la dernière en 2013), a choisi de s’offrir un nouveau défi aux côtés du champion olympique Greg Van Avermaet, au sein du team BMC. Un challenge très motivant, parce que l’ex-champion de Belgique (2008 à Knokke) n’a strictement rien à perdre dans l’aventure et sera, à coup sûr, un précieux relais du numéro 1 mondial sur les parcours flandriens, que l’un et l’autre connaissent par cœur. Anciens équipiers en début de carrière (Lotto), athlètes du même âge, Roelandts et Van Avermaet peuvent former un efficace binôme, sur les pavés du Tour des Flandres surtout.
Jens Keukeleire (Belgique/29 ans)
D’Orica-Scott vers Lotto-Soudal
Il aura attendu sa 10e saison chez les pros pour découvrir l’ambiance d’une équipe belge. Après des débuts chez Cofidis puis un long séjour chez les Australiens d’Orica, le Brugeois Jens Keukeleire est l’un des renforts majeurs de Lotto-Soudal. Vainqueur du Tour de Belgique la saison passée, il espère surtout réussir une belle campagne flandrienne, lui qui s’était seulement incliné au sprint face à Greg Van Avermaet au bout de Gand-Wevelgem la saison dernière. S’il va enfin se fondre dans un univers culturel bien plus proche du sien, Jens Keukeleire va aussi affronter la pression inhérente à son statut de transfert « flamand », dans une équipe belge. Du Circuit Het Nieuwsblad jusque et y compris Paris-Roubaix, il faudra assumer.
Julien Vermote (Belgique/28 ans)
De Quick Step vers Dimension Data
L’été dernier, il a frappé les imaginations des suiveurs et téléspectateurs en tirant d’interminables bouts droits, en tête de peloton, lorsque les étapes du Tour offraient de belles opportunités aux sprinters (et donc à Marcel Kittel, dans ce cas précis). Julien Vermote est l’un de ces Flandriens durs au mal, opiniâtres, qui oublient les moments de souffrance dans les victoires par procuration, conquises par ses leaders. Cet altruisme, Mark Cavendish n’y est pas resté insensible, aussi le Britannique a-t-il insisté auprès de ses employeurs sud-africains pour enrôler son ancien équipier (entre 2013 et 2015 chez Quick Step). À 28 ans, celui-ci change pour la première fois d’univers professionnel (sept saisons auprès de Patrick Lefevere) et, dans le même élan, de format. Le Courtraisien cherche légitimement à mieux cerner ses propres limites, son espace de liberté devrait de facto être bien plus large qu’auparavant lors des courses d’un jour, sur le pavé de Flandre surtout.
Edward Theuns (Belgique/26 ans)
De Trek-Segrafredo vers Sunweb
La fraîcheur du team allemand n’a échappé à personne, la saison dernière (Tom Dumoulin vainqueur du Giro, Michael Matthews et Warren Barguil lauréats des maillots vert et à pois du Tour). C’est à cette source vivifiante qu’Edward Theuns espère régénérer ses ambitions, après deux exercices chez Trek où le Gantois a confirmé qu’il était une valeur sûre du subtop (victoires d’étapes sur le BinckBank Tour et le Tour de Turquie, deux épreuves du WorldTour). En s’affranchissant de son copain Jasper Stuyven, en s’éloignant de John Degenkolb, le Gantois espère tracer sa propre route dans ces classiques flandriennes a priori taillées sur mesure pour ses mensurations et aspirations. Son accessit sur le vélodrome de Roubaix, au printemps dernier (8e), a quoi qu’il en soit élargi le champ des possibles.
Ben Hermans (Belgique/31 ans)
De BMC Racing Team vers Israël Cycling Academy
Assurément l’un des choix les plus surprenants et audacieux du mercato belge ! Alors qu’il était un pion stable et fiable du team BMC depuis quatre saisons, le Limbourgeois a délibérément choisi de quitter une des meilleures équipes de l’élite pour reculer d’un rang et enfiler le maillot bleuté d’Israël Cycling Academy, au niveau Continental Pro. Une décision que le dernier vainqueur du Tour d’Oman fonde sur son envie de liberté. Bon grimpeur, puncheur tonique, le coureur hasseltois se sentait en effet enserré dans un corset, trop souvent contraint d’épauler Richie Porte ou Tejay van Garderen sur des terrains escarpés où son talent aurait tout autant pu s’exprimer. Il sera un incontestable leader d’une équipe israélienne en devenir (elle sera conviée au Giro, qui s’élancera en théorie de Jérusalem) mais dont le programme, soumis au bon vouloir des organisateurs, restera aléatoire.
Par Eric Clovio – Photo : Quick Step Floors/Sigfrid Eggers
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