Cela fait de nombreuses années que les équipementiers des équipes cyclistes professionnelles innovent au gré des règlements, principalement sur le contre-la-montre. Cet exercice en solitaire ou par équipe implique l’obligation de faire face au vent, un souffle qui peut être traître dans la quête du moindre km/h supplémentaire. Tout est scruté pour permettre une parfaite pénétration dans l’air du cycliste, depuis ses couvre-chaussures, jusqu’à son casque en passant par son maillot, ses prolongateurs de guidon et son cadre. Les tests en soufflerie sont aujourd’hui monnaie courante, même si l’exercice chronométré représente pour la plupart des professionnels un peu plus d’une centaine de kilomètres par an. Soit une part infime de la distance totale couverte sur une saison. Mais ces secondes perdues sur le chrono peuvent souvent être fatales dans la quête d’un classement général d’une course par étapes. Alors que d’autres spécialistes veulent profiter de leurs qualités sur l’exercice en solitaire pour glaner des succès professionnels se basant avant tout sur le physique, plus que sur la tactique.
Ces équipements ont donc largement évolué avec les budgets rehaussés en recherche et développement. Outre les cadres et les prolongateurs (qui peuvent depuis cette année être plus fortement inclinés près du visage selon la taille du cycliste), les casques ont également pris une plus grande importance. Si le cycliste est parfaitement placé sur la machine, la tête reste l’un des premiers points de pression du vent. Le casque doit donc être parfaitement profilé pour bien pénétrer dans l’air. Mais comment cette pénétration doit se faire ?
De plus en plus de casques surprenants
Jusqu’ici, les casques en forme d’amande étaient préférés. Mais des constructeurs sont arrivés avec d’autres propositions. L’équipementier suédois POC a été l’un des plus innovants voici dix ans avec son casque Tempor qui semble transformer la tête du cycliste en vaisseau spatial. La firme américaine Specialized a également surpris voici deux ans avec l’arrivée de cagoules dans un casque plus large que la normale, utilisé par Soudal-Quick Step ou Bora-Hansgrohe. Plus récemment, le groupe italien Rudy Project a dévoilé un casque au design semblable à celui de Poc, le Windgream HL 85 utilisé depuis cette saison par l’équipe Bahrain Victorious. Et puis, il y a ce fameux casque rond et longiforme de Giro, arboré depuis la première étape de Tirreno-Adriatico par les sociétaires de Visma | Lease a Bike.
Voir cette publication sur Instagram
Si ces diverses innovations ne contreviennent a priori pas au règlement de l’UCI, qui prévoit des dimensions minimales et maximales pour chaque équipement du vélo et sur le cycliste, elles interrogent toutefois sur la sécurité des professionnels. Face aux interrogations, la fédération internationale n’a pas tardé à mettre sur pause les projets de plus en plus surprenants de ces équipementiers. Deux ans plus tard, l’UCI a ainsi décidé de bannir à partir du 2 avril 2024 les fameuses cagoulées utilisées avec les casques TT5 de Specialized. Il reste à savoir si cet objet jugé comme « non-essentiel » par la fédération, avait un réel impact sur la performance sportive de ceux qui l’utilisaient jusqu’alors.
« La performance avant la sécurité »
L’instance dirigeante a également confirmé la mise en place d’une enquête approfondie sur les autres casques innovants introduits ces dernières années, comme le POC Tempor, le Rudy Project Windgream HL 85 ou encore le Giro Sport Design. « Ils soulèvent un problème notable concernant la tendance actuelle et plus large en matière de conception des casques de contre-la-montre, qui vise davantage la performance que la fonction première d’un casque, à savoir assurer la sécurité du porteur en cas de chute », s’interroge l’UCI par voie de communiqué. Cela pourra potentiellement mener à un changement de règlement ou des interdictions plus claires concernant ce matériel qui évolue encore plus vite avec la professionnalisation galopante du sport.
Il faudra donc encore patienter quelques mois avant que l’UCI adapte ou non ses règles. En attendant, les innovations risquent de se poursuivre au fil des courses. Et les équipementiers profiteront certainement de la moindre absence de règle établie pour tenter de repousser les limites du sportif.