La foule était compacte, ce dimanche après-midi, sur les pentes de la Citadelle de Namur. L’ambiance des grandes journées d’hiver dans les labourés, malgré le vent froid et la pluie glissante. Certains argueront qu’il s’agit de vraies conditions de cyclo-cross. Et cela ressemblait en effet à un véritable cyclo-cross, après une succession de courses rapides et sans grande difficulté technique. Après le Koppenbergcross, ce circuit de Namur annonçait une course aussi usante. Et en prime, la pluie s’invitait sur le tracé pour cette dernière course de l’Euro, certainement la plus attendue : l’épreuve des élites hommes. Après deux journées de casse-tête à s’interroger sur la bonne pression de pneus, les bons boyaux à choisir, toute stratégie était bouleversée par cette averse annoncée dans l’après-midi et désormais bien présente pour inonder un circuit déjà détérioré par trois jours de compétitions intenses.
Iserbyt, touché à la jambe gauche
Et cela ne ratait pas : premier passage sur le dévers mouillé, voici Eli Iserbyt contraint de quitter sa monture. Le favori belge connaissait un saut de chaîne qui le faisait reculer de la première à la septième place. Et au fil des passages techniques, il devait même céder d’autres positions. Jusqu’à renoncer au deuxième tour. « Quand je suis remonté sur mon vélo, j’ai senti quelque chose dans ma jambe gauche. Une tension ou une torsion ? Je n’en ai aucune idée, mais j’avais très mal. C’est dommage, car jusque-là, je me sentais vraiment bien, j’avais pris un bon départ », explique Iserbyt à l’antenne de la VRT. « C’est très étrange. Depuis mes problèmes récurrents au dos, je lutte contre une sorte d’engourdissement sur mon flanc gauche. Je pensais que cela allait mieux, mais c’est revenu aujourd’hui. Le problème n’est plus le dos lui-même, mais je pense que ce doit être quelque chose de chronique. C’était jusqu’ici sous contrôle, mais avec ce mauvais mouvement, cela s’est à nouveau irrité ».
Un favori en moins… Autre victime des chutes : Quinten Hermans. L’autre outsider belge était en lutte pour le podium avec Laurens Sweeck quand une faute technique l’a emporté au sol. « Mes jambes ne répondaient plus comme je le voulais et après, j’ai subi une crevaison juste après le poste matériel », explique le coureur de Tormans. Face à la douleur, celui qui avait reculé de la troisième à la quinzième place devait finalement abandonner. « Je m’étais énormément investi dans la préparation de ce championnat d’Europe et j’étais dans la forme que j’espérais. Je suis évidemment déçu de ne pas avoir pu pleinement défendre mes chances », regrette celui qui a enchaîné les coups de malchance depuis son retour dans les labourés à Ardooie.
Une faute pour Vanthourenhout mais…
Et dès le deuxième tour, c’est le leader même de cette course qui goûtait à la boue de la Citadelle. Sur un circuit de plus en plus glissant, principalement dans la descente vers la route des Canons, le Néerlandais Lars van der Haar, jusqu’ici impérial dans ses sorties en puissance, laissait Michael Vanthourenhout rentrer des suites de cette mauvaise chute. Au tour suivant, c’est le Belge qui connaissait une glissade au même endroit, laissant alors son adversaire néerlandais reprendre les devants. « J’avais de super jambes aujourd’hui, mais j’ai fait une faute sur ce tour-là. Cela a été très dur d’ensuite rentrer sur Lars », confirme Vanthourenhout, tout de même revenu dès le tour suivant dans le sillage de Van der Haar, malgré un effort intense sur ces chemins toujours plus glissants et dangereux.
Van der Haar : « Il m’a fait faire des erreurs »
À la mi-course, une crevaison contraignait Lars van der Haar à repartir derrière Vanthourenhout, jusqu’ici sous pression. « Avant ma crevaison, j’avais tout sous contrôle. Mais après cela, Vanthourenhout a mis en route et cela m’a fait faire des erreurs », confie le Néerlandais. Son rival belge le sentait et enchaînait les passages techniques à toute vitesse, pendant que derrière, Van der Haar glissait et allait même se faire mal contre un poteau… « Je savais que je ne devais jamais le laisser creuser un écart avant une descente, et c’est ce qu’il a réussi à faire. Après, il était parti… (…) J’ai aussi fini à fond contre un poteau, et j’en ai souffert par la suite », ajoute Van der Haar. « Je devais constamment le garder sous pression, mais il a finalement fait quelques erreurs. Je pense qu’aujourd’hui, j’étais meilleur sur le plan technique et c’est là que j’ai pu faire la différence. Mais c’était aussi fou dans la foule, aujourd’hui. Il fallait essayer de ne pas se laisser submerger », répond Vanthourenhout, parti dès le cinquième tour pour un solo qu’il allait finaliser sans fausse note.
Malgré ces chemins piégeux sur la Citadelle, le coureur belge de 28 ans était poussé par les vivats de la foule vers une première victoire sur un championnat professionnel, de surcroît un championnat d’Europe. De quoi laisser exulter sa joie par un franchissement de ligne avec le vélo au-dessus de lui. Une joie communicative devant la dizaine de milliers de spectateurs présents sur le sommet namurois. « Cela signifie beaucoup pour moi. Je n’avais jamais porté de maillot de champion parmi les élites, c’est la plus grande victoire de ma vie », lâchait-il après avoir salué sa femme et son enfant de quelques mois. « Cela fait beaucoup de bien. Ces dernières semaines ont été moins bonnes, mais sur le Koppenberg, mardi, je me sentais mieux et cela m’a donné confiance. Aujourd’hui, j’ai senti dès l’échauffement que j’étais en bonne condition. Le moral était aussi bon. C’est ce qui m’a permis d’aller chercher cette grande victoire », relance encore le nouveau champion d’Europe Michael Vanthourenhout, également emporté par l’émotion en grimpant sur le podium pour chanter l’hymne national devant une foule acquise à sa cause.
Sweeck : « Pas dans un super jour »
Lars van der Haar devait se contenter de la médaille d’argent, un an après son deuxième titre européen, mais il ne regrettait rien : « Physiquement, nous étions certainement à égalité avec Michael et sur les montées, j’étais même peut-être un peu meilleur. Mais il a été très propre techniquement et il mérite cette victoire », indique le Néerlandais. Le podium est complété par le Belge Laurens Sweeck, également victime d’une chute, mais toujours bien en place pour accrocher la troisième place à plus de deux (!) minutes du vainqueur du jour : « Secrètement, j’espérais un meilleur résultat, mais je pense que je peux être satisfait de ce que j’ai réalisé aujourd’hui. Ma condition était bonne, mais je n’étais pas non plus dans un super jour. Et j’avais vraiment besoin de ça pour me battre pour la victoire sur un tel parcours. Je pense que c’était la meilleure position atteignable« , indique le coureur belge, qui a failli rentrer sur Van der Haar et Vanthourenhout avant une mauvaise chute au troisième tour. « Je me suis rapproché d’eux, mais j’étais à la limite, et c’est là qu’on fait des erreurs. C’est un signe que je ne pouvais pas aller plus vite. Les deux premiers étaient juste trop forts ».
Résultats de la course des élites hommes des championnats d’Europe de cyclo-cross 2022 à Namur :
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