Le troisième et dernier Grand Tour de la saison se profile, avec son habituel bataillon de grimpeurs, et son lot de surprises que seul un tel Grand Tour au profil spectaculaire peut offrir. Dans ces montagnes raides, la forme ne trompe pas, et les candidats au maillot rouge devront être bien armés pour affronter ces trois semaines entre Burgos et Saint-Jacques-de-Compostelle. Revue des troupes sur la péninsule ibérique.
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Primoz Roglic (Slo, Team Jumbo-Visma)
Double vainqueur sortant du Tour d’Espagne, le Slovène revient sur la Vuelta avec l’espoir de réaliser un triplé historique depuis Roberto Heras au début des années 2000. Il retrouve également le peloton dans une position particulière, de celle du coureur blessé désireux de prendre sa revanche. Roglic a quitté le Tour de France meurtri, après l’avoir préparé avec minutie dans les montagnes alpestres. Une chute dès le premier jour de course a anéanti ses espoirs de maillot jaune, et l’abandon s’annonçait comme la seule issue au bout de la première journée en montagne. Le leader de Jumbo-Visma s’est reposé, s’est requinqué, et a repris les entraînements, se lançant dans une première course contre-la-montre afin d’être en condition pour les Jeux Olympiques. Et entre Tokyo et le Mont Fuji, Roglic n’a pas déçu : certes en-deçà lors de la course en ligne, le coureur slovène a mis tous les rouleurs d’accord sur le chrono montagneux du mercredi suivant. Le voici avec l’or autour du cou, les anneaux dans la tête.
Cette victoire au Japon a replacé Primoz Roglic en tête de la liste des favoris pour cette Vuelta. Certes, le plus long contre-la-montre de cette Vuelta intervient le dernier jour de course, mais les étapes montagneuses présentées ne devraient pas lui déplaire. Surtout, la fin de la troisième semaine de course, durant laquelle il a parfois montré des faiblesses, sera moins ardue que ces dernières années. Et avec l’équipe Jumbo-Visma présente à ses côtés (avec notamment Sepp Kuss, Sam Oomen et Steven Kruijswijk, s’il retrouve ses sensations pré-Tour), Roglic a ce qu’il faut pour briller une troisième fois sur ces pentes espagnoles.
Egan Bernal (Col, INEOS Grenadiers)
Voici certainement la plus claire menace de Roglic lors des trois prochaines semaines. Comme sur les deux précédents Grands Tours de la saison, l’équipe INEOS Grenadiers présente une sélection impressionnante au départ de la Vuelta. La formation britannique annonçait dès le début de saison un effectif capable de jouer sur tous les tableaux, elle le confirme sur ce Tour d’Espagne avec la présence de quatre leaders potentiels pour le maillot rouge. Vu sa victoire sur le Tour d’Italie et sa récente performance lors de l’étape-reine du Tour de Burgos vers les Lacs de Neila, le Colombien Egan Bernal paraît être le leader naturel d’une formation qui l’a déjà propulsé à deux reprises en tête d’un Grand Tour. Certes touché par le Covid-19 à la sortie du Giro, son retour aux affaires sur la Clasica San Sebastian et le Tour de Burgos montrent qu’il sera prêt pour ce dernier grand rendez-vous de la saison en ce qui le concerne.
Egan Bernal a démontré sur le Giro une nouvelle maturité, qui lui permet de contrôler tout type de situation, entre la plaine et la haute montagne. Bien épaulé par Daniel Martinez en Italie, il n’aura cette fois pas le soutien de son compatriote, mais il appréciera l’appui du Britannique Adam Yates, qui s’était déjà livré pour son frère Simon lors de la victoire de ce dernier sur la Vuelta 2018, de l’Équatorien Richard Carapaz, deuxième de la Vuelta l’an dernier, troisième du récent Tour de France et tout frais champion olympique sur route, ou encore du Russe Pavel Sivakov, quatrième du récent Tour de Burgos et toujours en formation dans l’ombre de ses leaders à tout juste 24 ans. Bref, même si Bernal connaît un coup de mou, l’équipe INEOS Grenadiers dispose d’un panel de grimpeurs capable de prendre le relais en un clin d’œil. On n’est jamais à l’abri…
Mikel Landa (Esp, Bahrain Victorious)
Sorti du Tour d’Italie sur une malheureuse chute avec un signaleur, Mikel Landa restait une énigme à l’aube de ce Tour d’Espagne. Allait-il rapidement retrouver sa condition pour la course au maillot rouge, après plus d’un mois sans vélo et une longue revalidation ? Le grimpeur basque a rapidement répondu aux interrogations sur le récent Tour de Burgos, qu’il a tout simplement remporté au terme d’une épreuve des plus animées, comme l’équipe Bahrain Victorious l’apprécie. Bien épaulé par Mark Padun, le grimpeur espagnol y a confirmé son esprit offensif et sa régularité sur les fortes pentes. Il appréciera donc les cols présentés sur cette Vuelta, sur lesquels il devra profiter de cet avantage. Car sur les contre-la-montre, Landa perdra irrémédiablement du temps sur les adversaires cités plus haut…
Mikel Landa s’annonçait déjà comme un favori du Giro, il le sera encore plus sur cette Vuelta. La revanche en tête, évidemment, mais aussi l’équipe qui l’entoure. Mark Padun et Damiano Caruso ont confirmé lors du Tour de Burgos qu’ils sont également en grande forme et pourront être d’une grande aide en montagne. Sans oublier Wout Poels, qui devrait avoir un rôle de protecteur par rapport à celui d’attaquant qu’il affichait sur le récent Tour de France. Ajoutez Gino Mäder qui peut tant rouler des bouts droits dans la plaine que mener un train dans la montagne, et Jack Haig, également contraint à l’abandon sur chute lors du récent Tour de France mais désireux de se refaire la cerise en Espagne. Voici un effectif qui peut clairement jouer le maillot rouge. Il ne reste plus à espérer pour Landa qu’aucun grain de sable ne vienne enrayer ces rouages bien huilés. Ce qui a souvent mis fin à ses espoirs de première victoire sur un Grand Tour depuis cinq saisons maintenant.
Miguel Ángel López (Esp, Movistar Team)
Comme pour l’équipe INEOS Grenadiers, la formation espagnole Movistar démarre souvent sur la Vuelta avec de multiples leaders, sans définir directement celui qui mènera le groupe à la conquête du classement général. Le vétéran Alejandro Valverde se présentera à 41 ans au départ de sa 15e édition du Tour d’Espagne, et sera certainement l’un des protagonistes en montagne ainsi que sur les quelques étapes vallonnées tracées lors des deuxième et troisième semaines de course. Mais deux équipiers devraient plutôt prendre la tête du groupe pour ces trois semaines espagnoles. D’un côté, Enric Mas, sixième du Tour de France, retrouvera la compétition et s’annonce comme un leader naturel au vu des prétentions de Movistar depuis son arrivée en 2020.
De l’autre, le Colombien Miguel Ángel López dont la condition reste un mystère. Alors qu’il s’annonçait en grande condition au départ du Tour après ses victoires sur le Tour d’Andalousie et le Mont Ventoux Dénivelé Challenge, et sa sixième place sur le Dauphiné, le coureur a ensuite subi le Tour. Victime d’une chute sur la troisième étape, il n’a jamais retrouvé ses jambes par la suite, renonçant même aux trois dernières étapes. Le coureur de 27 ans a l’opportunité de refaire parler la poudre sur des longs cols qui favorisent ses qualités, lors de cette Vuelta. Il a également une âme d’attaquant qui peut le placer au sommet du général. Mais il devra faire parler sa puissance dans les cols s’il souhaite s’offrir le maillot rouge, car le contre-la-montre final n’est clairement pas pour ce pu grimpeur.
Romain Bardet (Fra, Team DSM)
En verve dès les premières pentes du Tour de Burgos, s’offrant sa première victoire professionnelle en deux ans et demi sur l’étape du difficile Picón Blanco, le Français Romain Bardet a en même temps connu une guigne qui semble le poursuivre depuis le début de sa carrière. Dans cette même étape, le leader de l’équipe DSM a chuté dans la descente finale. Et selon ses dires, cette embardée a pesé sur son état de forme lors de l’ultime étape du Tour de Burgos, au sommet des Lacs de Neila. Bardet y a perdu le classement général, mais a souhaité rassurer quant à sa condition en vue de la Vuelta. Et au vu de ses performances, le Français peut clairement se lister parmi les favoris.
D’abord annoncé comme co-leader au côté de Jai Hindley, Romain Bardet sera finalement le seul et unique homme de tête du groupe. Toujours présent sur les courses par étapes auxquelles il a pris part sous le maillot de la DSM, le coureur auvergnat devrait faire des étincelles sur les pentes espagnoles s’il se montre aussi offensif que sur le Giro. Moins bon au contre-la-montre, il devra donc jouer cette carte pour espérer conquérir son premier maillot rouge. Avec les grimpeurs Chris Hamilton et Michael Storer à ses côtés, il peut ambitionner une place de choix sur cette Vuelta.
Fabio Arù (Ita, Team Qhubeka-Next Hash)
Voici une nouvelle énigme au départ de ce Tour d’Espagne : cette course serait-elle celle du retour à l’avant-plan de Fabio Arù ? Le coureur sarde semble en perdition depuis sa cinquième place sur le Tour de France 2017 et son passage chez UAE Team Emirates. Son transfert, l’hiver dernier, chez Qhubeka, était également attendu mais ses résultats en début de saison ne montraient pas forcément un retour en verve. À tel point que la formation sud-africaine a décidé de le laisser à la maison pour le Tour de France. Qu’importe, Fabio Arù est revenu doucement en haut de l’affiche avec une deuxième place sur le montagneux Sibiu Tour, en Roumanie, avant de décrocher une surprenante deuxième place lors du Tour de Burgos, idéale préparation à cette Vuelta.
Le grimpeur italien réalise son meilleur enchaînement de places d’honneur depuis trois ans, mais cela suffira-t-il pour une course de trois semaines aussi exigeante que la Vuelta ? Arù y croit en tout cas et confirme son histoire particulière avec l’épreuve espagnole, seul Grand Tour à son palmarès (en 2015). La malchance est toutefois du côté du Team Qhubeka-Next Hash avant même le Grand Départ. Sur le Tour de Burgos, le vétéran italien Domenico Pozzovivo, qui aurait pu être un grand appui pour Arù, s’est fracturé le genou sur chute, alors que le Danois Emil Vinjebo, également prévu sur la Vuelta, s’est cassé la clavicule. Arù comptera donc sur Sergio Luis Henao, au mieux. Cela paraît léger pour jouer le général sur une telle course.
Tom Pidcock (G-B, INEOS Grenadiers)
Champion olympique de cross-country en VTT, à seulement 22 ans, Tom Pidcock a toujours de l’ambition. Technicien hors-pair qui s’est déjà distingué en cyclo-cross par le passé, le Britannique a également enchaîné les performances de choix sur route pour sa première saison professionnelle. Vainqueur de la Flèche Brabançonne et deuxième de l’Amstel Gold Race, il a déjà confirmé son potentiel sur les classiques vallonnées, quelques mois seulement après avoir subjugué le peloton des espoirs grâce à sa victoire sur le difficile Tour d’Italie destiné aux moins de 23 ans.
«Je ne suis pas pressé de disputer un Grand Tour», avait-il déclaré quelques heures après avoir glané l’or à Tokyo. Et pourtant, moins d’un mois après ce rendez-vous olympique, le voici dans la sélection cinq étoiles de l’équipe INEOS Grenadiers. Ce premier Grand Tour sera un apprentissage pour Tom Pidcock, mais aussi une préparation en vue du championnat du monde sur route sur lequel il ambitionne un premier sacre sur des routes limbourgeoises qui l’ont déjà consacré en avril dernier. Le Britannique devrait avoir deux rôles sur cette Vuelta : équipier-modèle pour les grimpeurs jouant le maillot rouge, et attaquant sur les quelques étapes vallonnées qui se profilent, idéales pour préparer la difficile course à l’arc-en-ciel qui s’annonce fin septembre à Louvain. Et vu son expérience affichée malgré son jeune âge, Pidcock sait comment gérer son pic de forme. La preuve à Tokyo, où il s’est offert la plus belle médaille malgré une fracture de la clavicule un mois et demi plus tôt…
Fabio Jakobsen (P-B, Deceuninck-Quick Step)
S’il apparaît déjà comme l’un des grands sprinters du peloton, Fabio Jakobsen ne disputera sur ce Tour d’Espagne que le deuxième Grand Tour de sa carrière. Le coureur néerlandais s’était distingué sur la Vuelta 2019 par une victoire lors de la 21e et dernière étape à Madrid mais depuis lors, sa lourde chute sur l’étape d’ouverture du Tour d’Espagne l’avait empêché de retrouver la liste de départ d’un Grand Tour. De retour à la compétition en avril dernier sur le Tour de Turquie, Jakobsen a depuis enchaîné les courses sans pression.
Et cela a réussi au coureur batave, qui a retrouvé la victoire à deux reprises sur le récent Tour de Wallonie. Sa préparation a été quelque peu bouleversée par une chute sur la Flèche de Heist, mais Jakobsen s’est rapidement relevé, et assure qu’il est en bonne condition pour cette Vuelta, sur laquelle il espère doubler son palmarès sur les Grands Tours. Il ne sera pas accompagné d’un train aussi impressionnant que Mark Cavendish sur le Tour de France, il bénéficiera toutefois de soutien de poids avec Bert Van Lerberghe, Zdenek Stybar et Florian Sénéchal comme ultime poisson-pilote, comme lors du Tour de Wallonie.
Arnaud Démare (Fra, Groupama-FDJ)
Sorti du Tour de France après une arrivée hors-délai au sommet de Tignes, Arnaud Démare espère retrouver de meilleures sensations sur cette Vuelta, qui pourrait lui permettre de rejoindre le club des vainqueurs d’étape sur les trois Grands Tours (il s’est déjà imposé à deux reprises sur le Tour de France et cinq fois sur le Tour d’Italie). Le sprinter français a connu un début de Tour très compliqué, loin des meilleurs sprinters, et compte donc sur une course moins dangereuse pour retrouver l’avant-poste du peloton en Espagne.
Et vu la liste des sprinters présents sur ce Tour d’Espagne et les étapes de plaine qui s’annoncent dès la première semaine de course, Démare peut clairement espérer au moins un bouquet. Le Français aura notamment Ramon Sinkeldamn et Jacopo Guarnieri pour le propulser dans l’ultime ligne droite, et devrait être parmi les plus véloces face notamment à Fabio Jakobsen, Michael Matthews (Team BikeExchange) Alberto Dainese (Team DSM), Jordi Meeus (Bora-Hansgrohe), Sebastián Molano (UAE Team Emirates) ou encore Jasper Philipsen (Alpecin-Fenix).
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Jasper Philipsen (Bel, Alpecin-Fenix)
Toujours déçu de ses six podiums sur le Tour de France, le jeune sprinter belge espère retrouver la victoire sur cette Vuelta qui l’a révélé au grand public la saison dernière. En larmes sur les Champs-Élysées après une nouvelle deuxième place, Philipsen reste heureux d’un Tour «constant», sans «grands problèmes». Mais la réussite n’a pas été de son côté. Depuis lors, le sprinter de 23 ans s’est reposé, et a préparé cette Vuelta avec l’espoir de poursuivre sur une voie victorieuse en Espagne. C’est la première fois de sa carrière que l’Anversois va enchaîner deux Grands Tours, mais son ambition est claire : s’offrir au moins une victoire d’étape.
Vu la concurrence annoncée, Jasper Philipsen peut croire en ses chances de victoire. Même s’il le dit lui-même : il sera difficile de contrôler le peloton avec aussi peu d’équipes de sprinters au départ. Groupama-FDJ, Deceuninck-Quick Step et le Team BikeExchange seront les clés sur les étapes de plaine, mais Alpecin-Fenix aura également son rôle à jouer pour mener son sprinter en tête de course dans les derniers kilomètres. S’il ne disposera pas de Tim Merlier à ses côtés, il sera tout de même emmené par des coureurs costauds comme Alexander Krieger, Edward Planckaert, récent vainqueur d’étape sur le Tour de Burgos, et Sacha Modolo. Bref, l’équipe continentale pro risque à nouveau de se mêler aux meilleures formations du WorldTour sur cette Vuelta.
Photos : ASO/Pauline Ballet – RCS Sport/La Presse/Marco Alpozzi et Fabio Ferrari
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