Transition parfaite entre les classiques flandriennes et les Ardennaises, la Flèche Brabançonne a ceci de particulier qu’elle permet tant aux sprinters sachant passer les côtes et pavés de faire la différence qu’aux grimpeurs de tester leur souffle sur un enchaînement digne des épreuves wallonnes. Le mélange est savoureux pour les spectateurs qui ont droit à une course de mouvements. Et cette année encore, les attaquants ont eu raison de passer à l’offensive, vu la frilosité des favoris annoncés de sortir du bois. L’Italien Sonny Colbrelli (Bahrain-Merida) en a donc profité pour aller conquérir l’un de ses plus grands succès, après avoir nerveusement mené le groupe d’échappés dans les trente derniers kilomètres.
Difficile d’appréhender la Flèche Brabançonne comme une simple course destinée aux sprinters costauds. Certes, le Schavei et ses 500 mètres à 6% de moyenne offrent une belle possibilité à un mince peloton de décider d’une victoire entre hommes forts. Mais l’enchaînement des 18 côtes en moins de 85 kilomètres précédant cette montée finale indique aux attaquants qu’il est possible de surprendre ces sprinters avec une offensive bien sentie et de bons relais dans la vallée de la Dyle. C’est ainsi qu’une douzaine de coureurs ont fait le bond aux avant-postes à moins de 35 kilomètres de l’arrivée avec parmi eux les Quick Step Dries Devenyns et Laurens De Plus, les Bahrain-Merida Sonny Colbrelli et Grega Bole ou encore le Lotto-Soudal Tiesj Benoot. De sacrés puncheurs qui peuvent clairement jouer la victoire dans le fameux Schavei.
« J’étais nerveux »
Seul problème : il faut encore s’entendre dans ce groupe d’outsiders… Les Bahrain-Merida ont donc pris le contrôle de cette meute, avec l’espoir de terminer avec ce mince peloton aux abords de la dernière ascension du jour. « J’étais nerveux car j’avais peur que le peloton revienne », confie Colbrelli qui a montré à plusieurs reprises à ses compagnons d’échappée qu’il souhaitait une meilleure collaboration, n’hésitant pas à crier sur ses rivaux. « L’équipe a en tout cas réalisé un super boulot ». Car ce sont bien les deux hommes en rouge et noir qui ont fait la majeure partie du travail, afin d’assurer la survie d’un groupe qui perdait des unités au fil des côtes. Et malgré l’attaque de Tim Wellens (Lotto-Soudal) et Petr Vakoc (Quick Step Floors) à 4 kilomètres du but pour rentrer sur ce groupe de tête, Colbrelli ne perdait pas pied et assurait nerveusement sa place en tête pour espérer mener le sprint final.
« Rendre la course plus dure »
Dans le peloton, personne ne semblait en effet enclin à prendre le contrôle des relais. Les favoris qu’étaient Bryan Coquard (Direct Énergie), Michael Matthews (Sunweb), Nathan Haas (Dimension Data) ou encore Philippe Gilbert (Quick Step) – il est vrai coincé par la course d’équipe -, ne parvenaient pas à s’entendre, laissaient couler avant de foncer à vive allure pour quelques kilomètres. Une stratégie loin d’être payante puisque le peloton arrivait dans le Schavei avec une bonne dizaine de secondes de retard sur le groupe de tête mené par… Colbrelli. « Je pensais qu’on allait faire tous ces efforts pour rien. Je voulais rendre la course plus dure », confie encore l’Italien. « Dans le sprint, je pensais que j’allais être enfermé par Vakoc mais j’ai su m’en sortir. C’est une victoire que je dédie à toute mon équipe, à Gaspa(rotto), à Grega (Bole), à Per… »
Gilbert semblait le plus fort
Colbrelli avoue ainsi que cette victoire était surtout « importante en vue de l’Amstel Gold Race ». Alors que les Quick Step et Lotto-Soudal, pourtant en surnombre dans le final, face à Colbrelli, ont manqué leur coup et ont subi une bonne leçon avant la classique néerlandaise, prévue dimanche autour de Maastricht. Tim Wellens et Tiesj Benoot n’ont pas su sur quel pied danser et ont chacun joué leur carte dans le sprint… sans succès. Les deux coureurs devront mieux s’entendre en vue du Cauberg pour éviter de rouler l’un contre l’autre sans le vouloir. De même pour les Quick Step : Devenyns et De Plus avaient l’occasion d’anticiper et de surprendre Colbrelli dans le dernier tour mais ils ont préféré attendre le sprint. Devenyns a lancé Vakoc, revenu du Diable vauvert, mais leur rival italien était bien plus puissant dans cette dernière ligne droite. Alors que derrière, Philippe Gilbert semblait avoir des fourmis dans les jambes, prêt à attaquer quand il le souhaitait. Une bonne leçon pour l’Amstel, on vous dit…
Résultats de la 57e édition de la Flèche Brabançonne (Louvain > Overijse, 198 km) :
1. Sonny Colbrelli (Ita, Bahrain-Merida)
2. Petr Vakoc (Tch, Quick Step Floors)
3. Tiesj Benoot (BEL, Lotto-Soudal)
4. Tim Wellens (BEL, Lotto-Soudal)
5. Bert-Jan Lindeman (P-B, LottoNL-Jumbo)
6. Christopher Juul-Jensen (Dan, Orica-Scott)
7. Dries Devenyns (BEL, Quick Step Floors)
8. Silvan Dillier (Sui, BMC Racing Team)
9. Victor Campenaerts (BEL, LottoNL-Jumbo)
10. Laurens De Plus (BEL, Quick Step Floors)
Grégory Ienco, à Overijse – Photo : Flanders Classics