Franck Bonnamour et Antwan Tolhoek suspendus provisoirement : quand le dopage refait la Une

Le Français Franck Bonnamour a été pris pour des anomalies sur son passeport biologique, alors que le Néerlandais Antwan Tolhoek a été contrôlé positif aux stéroïdes anabolisants.
Franck Bonnamour (Ag2r La Mondiale) lors du Critérium du Dauphiné 2023 et Antwan Tolhoek (Trek-Segafredo) lors du Critérium du Dauphiné 2022. - Photos : ASO/Billy Ceusters et Aurélien Vialatte
Franck Bonnamour (Ag2r La Mondiale) lors du Critérium du Dauphiné 2023 et Antwan Tolhoek (Trek-Segafredo) lors du Critérium du Dauphiné 2022. – Photos : ASO/Billy Ceusters et Aurélien Vialatte

Cela faisait longtemps que l’actualité autour du dopage dans le cyclisme n’avait pas été aussi pleine… Après des années noires durant lesquelles les suspicions allaient bon train dans et autour des pelotons, la problématique semblait s’éloigner au fil des saisons. Quelques cas sont toujours annoncés, les tricheurs et tricheuses sont sanctionnés et les courses suivent leur cours, sans polémique grandiloquente. Il y a toujours bien ces articles autour des cétones, ces compléments dont l’effet est toujours sujet à discussions, ou sur de nouvelles pratiques de dopage sanguin, voire génétique qui n’ont toutefois pas encore été vérifiées. Les scandales des années 2000 ne sont pas très loin, mais le cyclisme semble avoir mangé son pain noir.

Le passeport biologique en pleine lumière

Puis vient cette semaine particulière, durant laquelle les informations se succèdent autour de cas de tricherie potentielle. Cela a commencé lundi avec un communiqué de l’Union Cycliste Internationale (UCI) indiquant la suspension provisoire du Français Franck Bonnamour (Decathlon Ag2r La Mondiale) en raison “d’anomalies non expliquées dans son passeport biologique”. Cela faisait longtemps que cet outil destiné à vérifier les données biologiques d’un coureur sur une longue période n’avait pas été évoqué. Cet outil instauré en 2008 et aujourd’hui géré par l’International Testing Agency (ITA), indépendant de l’UCI, permet d’établir le profil d’un cycliste et de vérifier, à l’aide d’échantillons urinaires et sanguins prélevés tout au long de la saison, si des anomalies autour d’une potentielle prise de produits dopants ou d’une utilisation de méthode illicite sont détectées. Ces fluctuations sont surveillées par l’ITA, notamment à l’aide d’algorithmes. Des experts indépendants sont ensuite appelés à examiner ces anomalies.

Le cas de Franck Bonnamour confirme donc que des anomalies ont été détectées sur le passeport biologique, que les experts indépendants se sont accordés sur le fait que ces données indiquent un potentiel cas de dopage et que les explications demandées au cycliste français ne sont pas satisfaisantes. D’où l’annonce de l’UCI d’une suspension provisoire. Cela n’indique toutefois pas que le dossier est clôturé. Des auditions vont désormais avoir lieu et le coureur pourra se défendre auprès de l’UCI. En cas de culpabilité, Bonnamour risque une suspension de quatre ans, une amende ainsi qu’un retrait de ses résultats officiels durant la période sanctionnée. Celle-ci s’établirait “avant le 1er janvier 2023″, selon l’équipe Decathlon Ag2r La Mondiale qui a communiqué la suspension provisoire du Français au sein de la formation.

Les dossiers sont en tout cas longs, si l’on regarde aux précédents cas d’anomalies autour du passeport biologique. Et le seul cas sur lequel l’UCI s’est vu donner tort remonte à 2015. Le Tchèque Roman Kreuziger avait été provisoirement suspendu avant le Tour de France 2014 en raison d’anomalies détectées sur son passeport biologique de mars à août 2011 et d’avril à mai 2012. Le coureur avait alors publié toutes ses données sur son site internet et fait appel devant le Tribunal arbitral du Sport (TAS) de Lausanne, qui a statué en faveur de Kreuziger.

Antwan Tolhoek pris aux stéroïdes anabolisants

Deux jours plus tard, l’UCI adressait un nouveau communiqué concernant le Néerlandais Antwan Tolhoek. Le coureur de 29 ans a été contrôlé positif aux stéroïdes anabolisants androgènes (SAA), une substance interdite selon la liste de l’Agence mondiale antidopage (AMA), lors d’un contrôle réalisé hors compétition le 27 novembre dernier. Ce produit est principalement utilisé pour augmenter la masse musculaire. Le dossier est bien moins complexe cette fois : il s’agit d’un contrôle simple, avec la présence claire, selon l’ITA qui a diligenté ce contrôle, d’une substance interdite. Bien que provisoirement suspendu, Tolhoek a le droit de demander l’analyse d’un échantillon B et de défendre sa cause. Là encore, le dossier pourrait prendre plusieurs mois, voire années, avant d’être clôturé.

Non conservé chez Lidl Trek, le Néerlandais, fils de l’ancien pro Patrick Tolhoek, avait retrouvé un contrat cet hiver auprès de l’équipe continentale portugaise Sabgal/Anicolor. Un point de chute qui en a étonné plus d’un vu la carrière de ce grimpeur de poche qui avait fait les beaux jours de Jumbo avant ses deux saisons chez Trek. Il a notamment remporté une étape du Tour de Suisse en 2019 et terminé deuxième de la Ruta del Sol en 2021, avant des résultats plus discrets ces deux dernières années.

Le médecin de Nairo Quintana devant la justice

L’enchaînement de nouvelles autour de dossiers de dopage ne s’arrête pas là. Mardi, le quotidien français Le Télégramme a révélé que l’ancien médecin colombien de Dayer et Nairo Quintana chez Arkéa-Samsic, Fredy Alexander Gonzales Torres, va être jugé le 2 septembre prochain à Marseille pour “détention d’une substance ou méthode interdite aux fins d’usage par un sportif sans justification médicale, en l’espèce des équipements, outils, produits et dispositifs permettant de mettre en œuvre des perfusions et/ou des injections intraveineuses” lors du Tour de France 2020. Lors de l’épreuve, une perquisition menée à Méribel après la 17e étape avait permis la découverte de médicaments et d’une méthode qualifiée de dopante. Le parquet de Marseille a précisé que le médecin est aussi renvoyé devant le tribunal pour avoir administré le 16 septembre 2020 une “substance ou méthode interdite dans le cadre d’une manifestation sportive”, et ce, sans justificatif médical. Il risque jusqu’à cinq ans de prison et 75.000 euros d’amende. Nairo Quintana, lui, est cité dans l’enquête, mais n’est pas inculpé. Pas plus que son frère.

Révélations sur l’opération Ilex

Enfin, le quotidien espagnol Marca a dévoilé dimanche les rapports de l’unité de la Guardia Civil en charge des atteintes à la santé public, UCO, et du parquet de la communauté d’Estrémadure sur l’opération Ilex.  Cette enquête lancée en octobre 2021 a notamment permis de démanteler un vaste trafic de produits dopants dans le sport, dont le cyclisme, mené par le Dr Marcos Maynar de l’université d’Estrémadure. Plusieurs cyclistes seraient donc concernés par ce trafic, dont le Colombien Miguel Ángel López, dont le contrat chez Astana a été précocement arrêté en 2022 et qui a été suspendu provisoirement par l’UCI en juillet 2023 en raison de l’usage d’une substance interdite sur le Tour d’Italie 2022.

Selon les révélations de Marca, le Dr Maynar était en contact avec plusieurs coureurs de la ProTeam espagnole Caja Rural-Seguros RGA, récemment citée comme potentiellement touchée par des cas de dopage, sans aucune confirmation toutefois. Le Colombien Harold Tejada, toujours actif chez Astana et récent vainqueur de la 2e étape du Tour Colombia, est également pointé comme un potentiel client du trafic.

Le journal espagnol affirme cependant qu’aucune sanction pour dopage ne devrait être plaidée, et que seul le trafic de drogue serait retenu à l’encontre des différentes personnes soupçonnées d’être derrière cette opération d’envergure.

Les dossiers s’accumulent donc et confirment que la vigilance doit être permanente pour éviter que le cyclisme retombe dans ses travers. La communication de ces différents dossiers pourrait toutefois être améliorée, pour confirmer le travail des autorités face à ce fléau. En effet, si ces cas sont aujourd’hui médiatisés, le suivi laisse parfois à désirer. Le cas toujours pendant de l’Australien Robert Stannard, suspendu provisoirement depuis août 2023 pour des violations au règlement antidopage… en 2019, le confirme.

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