À peine engagé cette saison, le champion de Belgique Wout van Aert (Jumbo-Visma) a pu lever les bras dès sa première course, parfaitement gérée avec ses nouveaux équipiers au sein d’une équipe transformée. Une différence par rapport à 2021 qui a permis à Van Aert de s’isoler dans le final et de signer son premier succès sur la course d’ouverture de la saison belge.
La pression était grande devant un public enfin retrouvé. Une pression aussi intense que la passion affichée par des supporters massés par milliers au départ, à l’arrivée, sur les « bergs » et sur les pavés de ce Circuit Het Nieuwsblad. Les masques sont toujours là, les coureurs ne peuvent toujours pas être approchés comme à l’ère pré-Covid. Mais le plaisir se lit sur ces visages partiellement cachés. Sous son casque désormais affublé du taureau rouge d’une célèbre marque de boissons, dans son tricot noir-jaune-rouge désormais indissociable de ses exploits, Wout van Aert (Jumbo-Visma) sentait dès sa montée sur le podium installé dans le mythique Kuipke que tout un peuple attendait sa présence sur l’autre podium, installé à Ninove. Celui destiné au vainqueur et ses dauphins.
Car le départ de ce Circuit Het Nieuwsblad signait également le début d’une nouvelle ère pour Jumbo-Visma. Une équipe enfin décidée de mettre toutes les chances de son côté sur les classiques après avoir fait de même pour les Grands Tours ces cinq dernières années. Van Aert était isolé ? Ajoutons Tiesj Benoot, Tosh Van der Sande et Christophe Laporte pour le seconder. Les deux premiers étaient déjà présents ce samedi pour une première joute flandrienne qui devait leur permettre de prendre leurs marques ensemble. Pour leur première course de la saison, après près d’un mois de stage en Espagne, on ne peut pas dire que le test est manqué. On pourrait même signer d’une grande mention avec les félicitations du jury.
Vliegen : « Plutôt satisfait mais… »
Certes, on pouvait penser les hommes en noir et jaune en retrait lorsque le rouleur suisse Stefan Küng (Groupama-FDJ), le puissant belge Florian Vermeersch (Lotto-Soudal) et le puncheur belge Loïc Vliegen (Intermarché-Wanty-Gobert) s’extirpaient du peloton dans les 55 derniers kilomètres pour rattraper l’échappée matinale et anticiper les coups de butoir des favoris. « Me glisser dans l’échappée et anticiper, c’était effectivement le plan », confie Vliegen à l’arrivée. « Je suis plutôt satisfait de ma journée, mais j’ai juste un petit regret : j’aurais voulu que le peloton revienne sur nous un peu plus tard, en vue du Bosberg plutôt qu’avant Grammont. Sait-on jamais, la fin de course aurait alors peut-être un peu différente », ajoute-t-il. Car derrière, les Jumbo-Visma étaient bien attentifs et se montraient aux avant-postes à la sortie des circuits pour entamer les 35 derniers kilomètres tambour battant.
« Avec toute l’équipe, nous étions toujours là quand c’était nécessaire. On a suivi le plan prévu quasiment à la lettre », raconte Tiesj Benoot, léger sourire en coin, à l’arrivée. « J’ai dit à Nathan (Van Hooydonck) de rouler à bloc jusqu’au pied du Berendries, puis j’ai roulé à bloc jusqu’au sommet. Wout était bien présent, donc on a continué notre effort avec (Sonny) Colbrelli, (Tom) Pidcock, (Jhonatan) Narvaez», continue-t-il. Et les cinq hommes se permettaient de rentrer aisément sur le groupe précédemment cité, en quelques kilomètres. L’affaire semblait dans le sac. « Dans le Berendries, nous avons tout fait exploser avec l’équipe, comme c’était planifié. Et dès lors, nous avons toujours contrôlé la course », ajoute Van Aert. La collaboration dans ce groupe de favoris n’était toutefois pas idéale et Benoot en profitait pour s’isoler en tête de course dans la descente vers le Mur de Grammont. « Quand j’ai vu que j’ai pu faire un petit écart en tête, j’ai poursuivi mon effort à bloc jusqu’au Mur de Grammont. C’était difficile avec le vent de face… Mais c’était mieux pour Wout derrière », confirme Benoot, qui se retrouvait rapidement seul alors que le groupe Van Aert était repris par le peloton avant le pied du célèbre « Muur ».
Van Aert : « J’ai senti que je pouvais accélérer »
Personne ne s’isolait au sommet de Grammont et Benoot se retrouvait repris par un groupe d’une quinzaine de coureurs, sans que ceux-ci sachent vraiment quoi faire. « Après que Tiesj (Benoot) a été repris après le Mur de Grammont, nous étions face à un choix stratégique : soit nous continuions à attaquer, soit beaucoup d’autres coureurs revenaient de l’arrière. Finalement, on est passé à l’attaque », conte Van Aert. Profitant d’un moment de relâchement dans ce peloton de tête, le champion de Belgique accélérait en facteur à l’approche du Bosberg, avant de creuser définitivement l’écart sur les pavés de cette ultime ascension de la journée. « Je me sentais bien et je me suis dit que je pouvais encore accélérer à l’approche des pavés. C’était un peu une surprise pour mes rivaux. Et au sommet, j’attendais de voir si quelqu’un, derrière, parvenait à suivre, mais j’étais finalement seul avec un écart. J’ai donc poursuivi mon effort, à fond jusqu’à l’arrivée ».
Une stratégie payante pour celui qui a cette fois pu bénéficier de l’appui d’un équipier de luxe. Benoot s’est chargé de faire le boulot, d’attaquer, de saper le moral des adversaires avant que Van Aert conclut parfaitement d’une accélération sans bavure. En pur rouleur, le champion de Belgique a été décrocher sa première victoire sur le Circuit Het Nieuwsblad, la première pour un champion de Belgique depuis Eddy De Wilde en 1989, la première pour un coureur débutant sa saison sur cette épreuve depuis Joseph Bruyère en 1980. « Je pense que Wout était clairement le plus fort aujourd’hui. Nous n’avons quasiment jamais perdu le contrôle de la course », résume bien Tiesj Benoot. « Je m’attendais à ce que Van Aert soit bien. Il a besoin de gagner de grandes courses cette année, je me doutais qu’il allait frapper fort », ajoute Tom Pidcock, trop loin dans le Bosberg pour suivre l’attaque fatidique.
Van Aert : « Pas encore à 100% »
Wout van Aert ne veut toutefois pas s’extasier outre mesure. Le leader de la Jumbo-Visma est évidemment heureux de sa première victoire de l’année sur route, il a cependant des objectifs clairs pour le prochain printemps : « On ne peut jamais se préparer complètement à une course lors d’un stage ou d’un entraînement. Mais je sentais évidemment que j’étais bien préparé. Ce que vous engrangez comme résultat positif est un bonus supplémentaire. (…) Je ne suis pas non plus à 100% de ma condition. En termes d’intensité, il y a encore du travail à fournir. J’étais bien, mais pour le Tour des Flandres et Paris-Roubaix, il faudra un peu plus », analyse-t-il, le ton sérieux. Cela passera notamment par Paris-Nice, épreuve sur laquelle il « espère franchir un premier cap. Avec Primoz (Roglic), nous viserons la victoire finale. Je veux y contribuer », annonce-t-il.
Sur le podium, Sonny Colbrelli parvenait à dominer le peloton arrivé une vingtaine de secondes derrière, devant Greg Van Avermaet (Ag2r Citroën Team), heureux de conclure au moins parmi les trois premiers. « C’est important pour le mental d’accrocher un podium lors du premier objectif de la saison. Cela va me donner de la confiance pour la suite. Je suis plutôt content de la façon dont nous avons couru. J’ai manœuvré un peu différemment par rapport aux autres favoris mais, au final, seul le résultat compte », commente l’ex-champion olympique qui espère désormais poursuivre sur cette voie pour accrocher de meilleurs résultats que l’an dernier avec son coéquipier Oliver Naesen, quatrième du jour.
Sénéchal : « On n’a pas bien couru »
Parmi les déçus du jour, les Quick Step-Alpha Vinyl apparaissaient en bonne position. « On n’a pas vraiment bien couru. Après, je n’avais pas de bonnes jambes non plus », lâche d’emblée Florian Sénéchal après sa 9e place du jour. « Le plan, à la base, était d’essayer d’avoir toujours quelqu’un à l’avant, d’éviter de se retrouver en poursuite. On a essayé de faire la course, mais c’était difficile. La course a été très dure dans les 100 derniers kilomètres », ajoute son équipier Yves Lampaert. Une course difficile qui s’explique également par de la malchance. «Kasper (Asgreen) a eu le Covid au début du mois de février, d’autres ont été malades. Après, Kasper a fait un super boulot malgré tout. On va travailler et discuter avec l’équipe pour la suite », confirme Sénéchal, prêt à lancer la revanche dès ce dimanche sur Kuurne-Bruxelles-Kuurne.
Résultats de la 77e édition masculine du Circuit Het Nieuwsblad (Gand > Ninove, 204 km) :
- Wout van Aert (BEL, Jumbo-Visma) en 4h50:46
- Sonny Colbrelli (Ita, Bahrain Victorious) à 0:22
- Greg Van Avermaet (BEL, Ag2r Citroën Team) m.t.
- Oliver Naesen (BEL, Ag2r Citroën Team)
- Victor Campenaerts (BEL, Lotto-Soudal)
- Rasmus Tiller (Nor, Uno-X Pro Cycling Team)
- Matteo Trentin (Ita, UAE Team Emirates)
- Andrea Pasqualon (Ita, Intermarché-Wanty-Gobert)
- Florian Sénéchal (Fra, Quick Step-Alpha Vinyl)
- Jasper Stuyven (BEL, Trek-Segafredo)
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