Championnats d’Europe de cyclisme sur route : comment Trentin a triomphé de Van Aert et Van der Poel

Grâce à une force collective et des adversaires frileux sous la pluie, Matteo Trentin a décroché un titre continental mérité, devant deux spécialistes de cyclo-cross : Mathieu van der Poel et Wout Van Aert.
Championnat d'Europe sur route 2018 - Matteo Trentin Vainqueur - UEC
Championnat d’Europe sur route 2018 – Matteo Trentin Vainqueur – UEC

L’Italie était l’une des équipes les plus dangereuses au départ de la course masculine des championnats d’Europe de cyclisme sur route, ce dimanche à Glasgow. La formation de Davide Cassani n’a pas manqué de le prouver : grâce à une force collective et des adversaires frileux sous la pluie, Matteo Trentin (Mitchelton-Scott) a décroché un titre continental mérité, devant deux spécialistes de cyclo-cross : Mathieu van der Poel (Corendon-Circus) et Wout Van Aert (Vérandas Willems-Crelan).

Sous la pluie, les chutes

Cette course masculine s’est déroulée sous la pluie, comme pour les dames, et a fait des dégâts tant sur les routes glissantes que sur les rues urbaines. Des chutes et des crevaisons ont émaillé toute cette journée de course, durant laquelle le moindre pépin demande un effort intense pour rentrer sur la tête de course. Le champion du monde Peter Sagan (Bora-Hansgrohe) en a fait les frais tout comme les outsiders Luka Mezgec (Mitchelton-Scott) ou Adam Blythe (Aqua Blue Sport). L’important était donc de bien rester sur sa machine, et de croiser les doigts pour qu’une pierre ne vienne pas se loger sous le pneu… Surtout, ce qui a étonné, c’est le nombre de coureurs décidant de quitter la course face à l’impossibilité de rentrer rapidement sur le peloton. De nombreuses équipes ont préféré ne pas lâcher trop d’équipiers pour ces concurrents en perdition, et cela a finalement coûté cher au final. La Slovaquie, la Slovénie, la Grande-Bretagne ou encore le Danemark se sont vite retrouvés sans leader ni coureur pour faire le tempo et dans le peloton, cela s’est ressenti. Peu d’équipes étaient enclins à faire le travail dans les cinq derniers tours, laissant tout le boulot aux favoris belges, italiens et néerlandais principalement.

C’est notamment grâce à ces abandons et renoncements que ces nations comme la Belgique ou l’Italie ont pris les commandes de la course. Avec l’envie de prendre les devants et de décider de la course aux médailles bien avant le dernier tour. Il s’agissait clairement de la bonne tactique vu le tracé proposé dans les rues de Glasgow, sinueux et technique à souhait avec cette pluie qui n’a pas cessé de mouiller les coureurs de bout en bout. Un peloton a bien du mal à s’organiser sur un tel parcours, et une offensive avec des coureurs des pays les plus solides dans ce final ne pouvait que s’offrir un large avantage. C’est ainsi qu’à une cinquantaine de kilomètres de l’arrivée, l’attaque du Belge Xandro Meurisse (Wanty-Groupe Gobert) suivi du contre de l’Allemand Nico Denz (Ag2r-La Mondiale) et de l’Italien Davide Cimolai (Groupama-FDJ), permettaient à un groupe d’onze coureurs de s’affranchir du reste du peloton. Avec en son sein des candidats au titre comme l’Italien Matteo Trentin (Mitchelton-Scott), le Belge Wout Van Aert (Vérandas Willems-Crelan), le Néerlandais Mathieu van der Poel (Corendon-Circus) ou encore le Suisse Michael Albasini (Mitchelton-Scott). Derrière, personne ne désirait revenir sur ce groupe : seuls les Français et les Allemands lançaient timidement des relais, vu que Denz et Pierre-Luc Périchon (Fortuneo-Samsic) ne sont pas forcément réputés pour leur pointe de vitesse, mais ces efforts étaient bien limités.

Trop de frilosité dans le groupe de tête

Ce groupe d’onze coureurs s’entendait parfaitement jusqu’à l’entame du dernier tour, durant lequel la tactique prenait le pas. Deux dernières montées à cinq et trois kilomètres de l’arrivée pouvaient en effet permettre aux puncheurs en verve de faire la différence avant une descente technique et dangereuse sous cette météo typiquement écossaise. Une chute venait toutefois perturber les plans à moins de dix bornes de la ligne. Van Aert, Van der Poel et Jesús Herrada (Cofidis) se retrouvaient seuls en tête avec les Italiens Trentin et Cimolai, qui avait été décroché suite à la chute avant de rentrer et de bosser comme un acharné pour son leader annoncé. Dans le sprint, Trentin était en effet annoncé comme le plus véloce, et une offensive de ses adversaires du groupe de tête était attendue. « En fait, cette chute a simplifié les choses », confie d’ailleurs le coureur italien. Car face au train solide emmené par Cimolai et au retour possible des coureurs en poursuite, personne n’osait prendre ses responsabilités. Van Aert et Van der Poel restaient sagement à l’arrière. Cela les a finalement menés à des places d’honneur.

L’Italie avait trois cartes à jouer avec Trentin, Elia Viviani (Quick Step Floors) et Sonny Colbrelli (Bahrain-Merida), il n’y avait donc plus qu’à terminer le boulot pour le coureur de la Mitchelton-Scott. « J’ai demandé à Cimolai de m’emmener pour le sprint et il l’a fait. Il a fait un travail spectaculaire, tout comme le reste de l’équipe italien », confie le futur champion d’Europe. Bien lancé par son équipier d’un jour, Trentin devait assurer sa pointe de vitesse face aux outsiders rapides que sont les cyclocrossmen Van Aert et Van der Poel. Mais les deux coureurs étaient un niveau en-dessous. Et Van Aert, plus particulièrement, a lancé bien trop tôt, dans le vent, cet emballage final. « Je suis déçu. Je croyais en mes chances au sprint », confiait au micro de la VRT le champion du monde de cyclo-cross après l’arrivée. « J’aurais pu attaquer dans la dernière côte mais avec les deux Italiens, cela n’aurait pas été en ma  faveur. Un des deux aurait réagi. Il fallait donc se concentrer sur le sprint ». Une décision qui n’a malheureusement pas rapporté mieux qu’une médaille de bronze. Un lot de consolation pour l’équipe belge qui semblait, comme souvent lors des derniers championnats internationaux, dominer son sujet en course avant de voir le titre s’échapper sur une dernière décision…

Trentin avait prévenu en Pologne

Pour Matteo Trentin, ce titre apparaît comme un soulagement, la victoire qui lui permet de voir cette saison 2018 sous de meilleurs augures. D’abord blessé durant l’hiver, victime de pépins à répétition sur les classiques printanières avant de chuter lourdement sur Paris-Roubaix, il n’est revenu en compétition que fin juin avec l’objectif de préparer ce championnat d’Europe. « Ce succès arrive après plusieurs coups de malchance durant cette saison. C’est une émotion incroyable », décrit le routier-sprinter de 29 ans, originaire… du Trentin. Sur le Tour de Pologne, la semaine précédant cette course au maillot bleu et blanc, le champion d’Europe avait enchaîné trois places d’honneur dont une troisième place sur les trois sprints massifs qui ont ouvert l’épreuve WorldTour. La confirmation qu’il était en bonne forme : « Je ne suis pas encore à mon meilleur mais cette semaine en Pologne doit me permettre d’être au mieux pour Glasgow et la Vuelta », disait-il au soir de son podium sur la première étape du Tour de Pologne. Une course d’équipe favorable et un sprint ravageur ont fait le reste. Matteo Trentin arborera désormais son maillot de champion d’Europe dimanche prochain sur la Hambourg Cyclassics avant le Tour d’Espagne, où il espère remporter un cinquième succès d’étape.

Lire aussi : Championnats d’Europe de contre-la-montre : Campenaerts prolonge et se forge une place de spécialiste, Duyck déçoit

Résultats de la course masculine des championnats d’Europe de cyclisme sur route 2018 à Glasgow (230,4 km) :

Résultats de la course féminine des championnats d’Europe de cyclisme sur route 2018 à Glasgow :

Photo : UEC/Union Européenne de Cyclisme

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