À force d’altruisme, il avait fini par anesthésier ce soupçon d’égoïsme pourtant bien placé qui permet à un coureur de faire le choix juste lorsque la possibilité de vaincre se présente à lui. Boris Vallée n’avait plus goûté aux saveurs du succès depuis l’été 2016, et une victoire d’étape sur le Tour de Wallonie (devant Tom Boonen, au Roeulx). Deux ans plus tard, le Verviétois a enfin gommé cette anomalie et chassé l’inquiétude sourde qui montait en lui.
In extremis, lors de l’ultime compétition 2018 et à l’autre bout du monde – le Tour du Lac Taihu, en Chine. « Un bonheur teinté de soulagement », résume l’ancien sociétaire des formations Lotto-Soudal et Fortuneo, qui a ainsi ponctué de belle manière le bilan d’une équipe Wanty-Groupe Gobert sacrée pour la troisième fois d’affilée championne de l’Europe Tour. « Je ne peux éviter une petite frustration, celle de n’avoir pu gagner de sprint en Chine (5 places dans le top 10 en 8 jours de course, dont deux deuxièmes places) mais au fur et à mesure de l’épreuve, avec le maillot de leader sur les épaules, je me suis avant tout focalisé sur la gestion de mes secondes d’avantage, avec prise de risques raisonnée et limitée. »
Cette réussite, sur les rives du lac Taihu et les terres d’un des sponsors de l’équipe wallonne, est un adjuvant pour Boris Vallée, confronté depuis trop longtemps à des pépins physiques qui l’ont souvent empêché de faire son job avec la sérénité voulue. « Après une très sévère chute à Dunkerque, il y a quelques mois, je n’ai pas encore réussi à chasser tous mes doutes lors de descentes rapides, sur sol mouillé en tout cas. Ces appréhensions finiront par disparaître, en prenant sur moi comme on dit. Mais ce sont surtout des problèmes respiratoires qui me limitaient, sans que je comprenne pourquoi. Dans la chaleur surtout, je souffrais et plafonnais très rapidement, sans que je comprenne pourquoi. Moralement, ça devenait difficile… »
Opéré des sinus avant l’hiver
Le voilà soulagé, la Faculté a apporté une réponse à ses interrogations. Il a ainsi été opéré des sinus fin octobre, afin d’élargir des canaux affligés de sévère rétrécissement. « Le simple fait de comprendre l’origine de mes maux m’a donné un coup de fouet moral, depuis la fin de l’été. »
À 25 ans, au bout de cinq saisons chez les pros, l’ancien élève de Christophe Brandt et Toto Detilloux n’a pas encore trouvé de plénitude mais cerne avec plus de justesse ce dont il est vraiment capable. Dans quel rôle dessine-t-il son avenir ? « Je suis capable d’être un bon poisson-pilote, un lead-out pour le sprinter de référence. Mais j’ai aussi démontré, aux côtés d’Andrea Pasqualon lors du Tour du Luxembourg ou de Guillaume Martin au Circuit de la Sarthe, que je peux être utile dans la protection d’un leader lors d’épreuves par étapes. »
Foncièrement, on ne le changera toutefois pas, il demeurera cet athlète généreux dans l’effort, collectif par nature, vaguement inquiet aussi, ce qui l’a parfois conduit à commettre des erreurs (charges de travail, plages de repos…). « Péchés de jeunesse », sourit-il. « Cette fois, je coupe deux grosses semaines, j’ai besoin de récupérer, de me vider la tête… » Les fourmis reviendront très vite chatouiller ses mollets, d’autant qu’il retrouvera très bientôt son voisin et ami d’adolescence Loïc Vliegen (transfuge du team BMC), sous le maillot bleuté Wanty-Groupe Gobert.
Par Eric Clovio – Photo : Wanty-Groupe Gobert
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