L’équipe Zaaf suspendue : les cyclistes payent encore le prix fort

Les derniers rebondissements autour de l’équipe espagnole Zaaf Cycling Team, accusée de ne pas payer à temps ses cyclistes, ne sont pas de bon augure pour l’avenir du groupe fondé par Riad Belatreche. L’homme d’affaires algérien et son directeur sportif Manel Lacambra restent muets depuis plusieurs semaines quant aux diverses révélations des médias, aux annonces de départ de neuf cyclistes durant le dernier mois ainsi qu’à la récente décision de l’Union Cycliste Internationale (UCI) de révoquer la licence continentale de l’équipe vu cet exode. L’UCI n’avait en fait pas d’autre choix : avec le départ de la championne d’Égypte Ebtissam Zayed Ahmed, annoncé sur son compte Instagram le 26 avril dernier, la Zaaf Cycling Team n’avait tout simplement plus dans son effectif le nombre requis de huit cyclistes sous contrat, au minimum. Aujourd’hui, l’équipe, déjà privée de participation au Tour d’Espagne, faute d’effectif suffisant, n’apparaît tout simplement plus sur le site de l’UCI, mais les dirigeants de cette formation, créée en 2022 et qui doit surtout son salut à la disparition du futur projet de B&B Hôtels-KTM, restent taiseux.

L’exode chez Zaaf Cycling Team continue : à quand une intervention de l’UCI ?

Et les scandales autour de la Zaaf ne s’arrêtent pas là. Neuf coureuses ont donc officiellement quitté l’équipe, qu’elles l’aient annoncé dans les médias ou sur les réseaux sociaux. Plusieurs d’entre elles ont pu retrouver un contrat, grâce à l’intervention de l’UCI qui a autorisé ces cyclistes qui n’étaient, selon leurs propos, pas payées depuis le début de la saison. Audrey Cordon-Ragot a signé chez Human Powered Health, Lucie Journier a retrouvé un contrat au Team Coop-Hitec Products, Mireille Meijering est désormais chez Movistar, Elizabeth Stannard a pu rejoindre Israel Premier Tech Roland et Heidi Franz a obtenu une place chez DNA Pro Cycling.

Une autre cycliste devait s’ajouter à cette liste : Michaela Drummond, deuxième de la Schwalbe Classic en début de saison, a signé le 28 avril au sein de l’équipe Farto-BTC. Une opportunité pour la Néo-Zélandaise de 25 ans qui espérait alors participer au prochain Tour d’Espagne. Tout comme son équipière italienne Debora Silvestri, annoncée comme potentielle participante à cette première Vuelta féminine. Mais comme l’a rapporté Vélo-Club, les deux cyclistes ont été bloquées par la RFEC, la fédération espagnole de cyclisme, qui n’a pas autorisé leur transfert à temps pour participer au premier Grand Tour de la saison. “Malheureusement c’est bien vrai. Encore une fois mise sur le côté… pendant que les autres peuvent continuer à rouler”, a confirmé Michaela Drummond en réponse au journaliste Charles Marsault. À l’heure d’écrire ces ligns, la RFEC n’a pas commenté ces informations, pas plus que l’UCI, qui avait pourtant bien autorisé, à titres individuels, ces divers transferts entre Zaaf et les nouvelles équipes de ces cyclistes privées de salaire.

Le courage de prendre la parole

La Zaaf Cycling Team est toujours enregistrée à la fédération espagnole de cyclisme et reste considérée comme un club cycliste, grâce au payement de sa licence auprès de la RFEC. Mais les questions se font de plus en plus pressantes quant aux responsabilités de la direction de cette équipe qui affirmait son ambition d’élaborer un budget de 4 millions d’euros pour grandir jusqu’au WorldTour dans les prochaines saisons. Les révélations d’Escape Collective sur l’absence de matériel adéquat pour les cyclistes, les payements de salaires manqués, les remarques sexistes de la part du staff, le management absent ou inexpérimenté… confirment que l’équipe ne pouvait pas poursuivre dans ces conditions. Mais l’absence de réponse de la part de la RFEC inquiète, surtout quant aux raisons de l’octroi de la licence à la Zaaf Cycling Team, en premier lieu, puis sa décision de ne pas directement débloquer la fameuse garantie bancaire vu l’absence de salaires depuis trois mois, et enfin le fait de bloquer le transfert de deux cyclistes dans le besoin.

Grâce au travail du syndicat The Cyclists Alliance et au courage de plusieurs cyclistes qui ont décidé de parler haut et fort des problèmes internes à la Zaaf Cycling Team, les coureuses prises au piège ont pu obtenir une solution pour poursuivre leur métier. Mais encore une fois, ce sont elles qui payent le prix fort. Une réglementation plus restrictive et la demande de garanties plus claires au sein de l’UCI doit permettre d’éviter ce type d’équipe. La Zaaf Cycling Team est quelque peu sortie de nulle part, elle disparaîtra certainement aussi vite. Mais cela doit servir de leçon, surtout dans un sport qui souhaite se professionnaliser.


Mise à jour 3 mai 2023, 11h43 : La RFEC a répondu aux questions de Velonews et confirme qu’elle n’a pas accepté les transferts de Michaela Drummond et de Debora Silvestri en raison de craintes légales autour des lois régulant les contrats de travail en Espagne. La fédération explique également travailler avec l’équipe Zaaf pour régler ce problème, mais affirme que le sort des deux cyclistes est bien entre les mains de la Zaaf. Le problème vient du fait que les potentielles équipes de Drummond et Silvestri sont espagnoles, ce qui pose un problème contractuel selon la loi espagnole. Les autres cyclistes qui ont pu quitter la Zaaf ne sont pas concernées par cette question légale car elles ont rejoint des équipes sous pavillon étranger. Même Mareille Meijering, qui a rejoint la Movistar, une équipe WorldTour qui accepte les licences venues de Suisse, via l’UCI.

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