Le débat revient chaque année. L’égalité entre les cyclistes masculins et féminines est toujours loin d’être établie, et cela se confirme au regard des chiffres. L’égalité salariale ne sera pas effective avant 2023 (et encore…, comme on vous l’expliquait dans cet article du 8 février) et au niveau des diffusions télévisées, s’il y a une amélioration claire, les courses féminines obtiennent encore et toujours un temps d’antenne restreint par rapport aux épreuves masculines (de toute manière plus nombreuses, surtout dans un calendrier miné par la crise sanitaire du Covid-19).
Le débat est donc réapparu sur les réseaux sociaux à l’occasion du Circuit Het Nieuwsblad. L’épreuve d’ouverture de la saison cycliste belge présentait une course masculine, et une course féminine qui, pour la première fois, se disputait après les hommes et était diffusée en télévision, à une heure de grande écoute. Une diffusion qui a eu un grand impact aux Pays-Bas : la course féminine a été suivie par plus de 330 000 personnes sur la télévision publique NOS, contre 170 000 téléspectateurs pour la course masculine. Mais les gains accordés aux vainqueurs des deux épreuves sont bien différents : 16 000 euros pour Davide Ballerini, contre… 930 euros pour la championne du monde Anna van der Breggen.
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Cette différence a mené à un large débat sur les réseaux sociaux. Plusieurs ont noté les efforts menés par l’organisation Flanders Classics qui a investi depuis plusieurs années pour le cyclisme féminin, grâce à un accord trouvé avec l’entreprise KPMG. Ce financement a permis une meilleure couverture médiatique des épreuves flandriennes destinées aux femmes. Et cela aide clairement à mettre en avant des sportives qui jusqu’il y a quelques années, ne bénéficiait quasiment d’aucun direct télévisé (à part les Mondiaux ou les J.O.).
Cela ne justifie évidemment pas un tel écart de gains. À tel point que des fans de cyclisme féminin ont lancé… une campagne de financement participatif pour permettre aux femmes d’obtenir des gains plus importants sur le Strade Bianche féminin. Plus de 26 000 euros ont été récoltés en moins d’une semaine. L’idée est belle, mais elle confirme que ce ne sont pas les organisations de courses et la fédération internationale de cyclisme qui prennent les responsabilités qui sont les leurs.
Ça ne devrait pas être au public de le faire mais Radio Bidon a supporté cette campagne GoFundMe pour que la gagnante des Strade Bianche touche une bourse égale à celle du gagnant chez les hommes. Pour contribuer —> https://t.co/HXki89YUdC
— Radio Bidon (@RadioBidon) March 4, 2021
Flanders Classics estime que des progrès sont actuellement nécessaires pour amener ses propres courses à un niveau supérieur pour permettre aux équipes féminines d’obtenir un subside de départ plus important, et pour bénéficier d’une couverture télévisuelle plus importante. Ce sont ces primes de départ accordées aux équipes féminines plus modestes et cette couverture médiatique plus importante qui peuvent permettre aux femmes d’obtenir plus d’argent. Car plus de directs en télévision (ou sur Internet) vont mener à l’attrait de plus de sponsors. Demandez à SD Worx, récent repreneur de l’équipe Boels-Dolmans, ou Jumbo, qui a récemment créé une nouvelle équipe féminine, ce qui les motive : l’égalité hommes-femmes, certes, mais également un plus grand attrait des médias, et des supporters.
Le cyclisme ne bénéficie d’aucun subside, et doit se construire sur une base financière vacillante, formée de sponsors historiques et de nouveaux mécènes qui arrivent parfois avec quelques euros, parfois avec des millions. L’équilibre est difficile, et cet argent est rarement investi sans espoir de retour. C’est malheureusement ce modèle qui touche désormais le cyclisme féminin, suite à sa professionnalisation ces dernières années. Les courses féminines sont certainement plus intéressantes, mais elles doivent encore bénéficier d’une couverture plus importante pour que les entreprises s’y intéressent, et même que le grand public s’y intéresse. Au grand dam des supporters du cyclisme féminin qui attendent impatiemment qu’Anna van der Breggen, Annemiek van Vleuten, Lotte Kopecky et les autres soient enfin reconnues à leur juste valeur.
Photo : RCS Sport/La Presse/Marco Alpozzi
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