Championnats d’Europe sur route – Trento : Colbrelli filoute face à Evenepoel, Nys brille sur route

Colbrelli chez les pros, Nys chez les espoirs, Grégoire chez les juniors : résumés, analyses et réactions des courses masculines de l’Euro sur route à Trento.
Sonny Colbrelli Remco Evenepoel - Championnats d'Europe sur route 2021 - Capture Eurosport

Lancer le sprint en tête du dernier virage : la consigne semblait claire sur l’ensemble des courses en ligne disputées sur ces championnats d’Europe. Elle a permis la victoire de quasiment tous les coureurs passés en première position au panneau des 200 derniers mètres. Seul Thibau Nys chez les espoirs a surpris ses rivaux alors que Remco Evenepoel chez les pros, a été débordé par Sonny Colbrelli, qui a joué sur le statut de favori de son rival belge pour le déborder dans le final.

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Élites : Colbrelli a joué au plus malin

Un enchaînement de cols pour plus de 3 400 mètres de dénivelé sur seulement 180 kilomètres de course : ce circuit de la course masculine des championnats d’Europe sur route annonçait une épreuve débridée. Les puncheurs et attaquants au départ de cette courte course au maillot étoilé ont confirmé ce scénario, avec une salve d’offensives durant les cent premiers kilomètres qui a déjà bousculé le peloton pour le réduire à une cinquantaine d’unités dès l’arrivée sur les circuits locaux autour de Trento. Le rythme n’a jamais faibli, aucune nation n’a vraiment pris le contrôle du peloton, et cela a permis une course des plus agréables pour les téléspectateurs/trices devant leur écran. Dans le peloton, pas question de tergiverser. Les Italiens et les Belges l’ont rapidement montré en suivant toutes les attaques menées en tête de course, avec l’espoir de placer un homme dans la course au titre sur ce circuit vallonné et favorable aux plus offensifs du peloton.

D’une cinquantaine de concurrents, le peloton se réduisait au fil des tours à une trentaine puis même une dizaine de coureurs, parmi lesquels le Belge Remco Evenepoel, l’Italien Sonny Colbrelli et le Slovène Tadej Pogacar. De sacrés favoris au maillot étoilé. L’avantage était toutefois aux Belges (avec Evenepoel accompagné de Ben Hermans) et aux Italiens (Colbrelli avec Matteo Trentin). La tactique semblait claire chez les noir-jaune-rouge : mener un train d’enfer sur la côte de Povo avant la sortie en force d’Evenepoel. Encore fallait-il décider dans quelle ascension. Finalement, l’offensive du Russe Pavel Sivakov sur l’avant-dernier passage sur le Povo décidait le Belge de 21 ans à sortir de sa carapace pour prendre la posture de favori ultime. “J’ai essayé de faire une première sélection dans l’avant-dernière côte, puis d’encore essayer de m’isoler dans la dernière ascension”, explique Evenepoel, d’abord accompagné de Colbrelli et du Français Benoît Cosnefroy, avant que ce dernier lâche prise dans l’ultime passage du Povo. “J’ai remarqué ensuite que Colbrelli était en difficulté et j’ai encore augmenté le rythme, mais il est parvenu à résister”, raconte le Belge, frustré de ne pas avoir pu mettre son rival italien dans le rouge.

La frustration, c’est le sentiment qui semblait prédominé dans le caractère de Remco Evenepoel dans ce final. D’abord énervé de voir Colbrelli et Cosnefroy ne pas prendre de relais assez rapidement, il montrait une nouvelle fois des signes de stress face au coureur transalpin dans le dernier tour. “Il y avait un homme avec qui je ne voulais certainement pas rouler jusqu’à l’arrivée. C’était Sonny Colbrelli. Malheureusement, il n’a pas craqué”, ajoute le coureur belge, conscient qu’il ne pouvait pas faire grand-chose de plus si ce n’est laisser l’Italien prendre des relais jusqu’à l’arrivée, au risque d’un retour de Cosnefroy et d’autres concurrents. “Nous étions probablement les deux plus forts de la course. (…) J’ai vu qu’il avait du mal, mais il a continué. Il a un meilleur sprint et il a misé là-dessus”, confirme Evenepoel, qui faisait toutefois une dernière erreur dans le dernier virage. En laissant passer Colbrelli à l’approche de l’ultime ligne droite, il accordait une large chance à l’Italien de développer toute son explosivité sur les 200 derniers mètres. “C’est dommage que je n’ai pas un bon sprint, je dois encore travailler là-dessus. J’aurais aimé décrocher ce maillot, mais on ne peut pas tout vouloir dans la vie. J’ai perdu le maillot pour un mètre donc c’est difficile à accepter tout de suite. Je ne sais pas si je serai aussi proche du but dans les prochaines années, mais le plus important est que je sois de nouveau présent”, conclut le leader belge, qui conclut ces championnats d’Europe avec une médaille de bronze et une médaille d’argent, tout de même bénéfiques à l’aube des Mondiaux.

Sonny Colbrelli, pour sa part, offre à l’Italie son quatrième titre continental consécutif après Matteo Trentin (2018), Elia Viviani (2019) et Giacomo Nizzolo (2020), autant de coureurs rapides. “Je ressentais la pression parce que nous courions à la maison et je voulais vraiment bien faire”, rapporte le champion d’Italie, qui conclut deux semaines de rêve après sa victoire sur le Benelux Tour et désormais sur le championnat d’Europe. “Quand j’ai vu que mes équipiers étaient bien et tournaient à la perfection, j’étais motivé et décidé à payer leurs efforts. (…) Après avoir suivi Evenepoel, je ne pouvais tout simplement plus lui donner de relais”, affirme-t-il. “J’étais à la limite, j’avais même un soupçon de crampe. Chacun a joué avec ses propres cartes. L’important était de rester en tête. Et dans le dernier virage, je voulais passer en premier, j’étais concentré”, confirme Colbrelli, qui s’offre ainsi son premier titre majeur à 31 ans, après un enchaînement de places d’honneur sur les grandes classiques (3e de l’Amstel Gold Race en 2016, 10e du Tour de France en 2017, 4e de Gand-Wevelgem en 2021). Il se place également comme un outsider clair sur des routes qu’il appréciera encore mieux, entre Anvers et Louvain, lors du championnat du monde. Les Belges sont désormais prévenus : il faudra encore plus attaquer Colbrelli sur ces côtes flamandes.

Résultats de la course des élites hommes (179,2 km) :

  1. Sonny Colbrelli (Italie) en 4h19:45
  2. Remco Evenepoel (BELGIQUE)
  3. Benoît Cosnefroy (France) à 1:30
  4. Matteo Trentin (Italie) à 1:44
  5. Tadej Pogacar (Slovénie)
  6. Marc Hirschi (Suisse)
  7. Markus Hoelgaard (Norvège)
  8. Ben Hermans (BELGIQUE) à 1:46
  9. Pavel Sivakov (Russie) à 1:49
  10. Victor Campenaerts (BELGIQUE) à 5:41
  11. Stan Dewulf (BELGIQUE) à 5:49
  12. Harm Vanhoucke (BELGIQUE) à 9:21

Espoirs : la consécration sur route de Thibau Nys

Également annoncée comme l’une des favorites sur le circuit vallonné de Trento, l’équipe belge décidait de mener la course de front sur cette épreuve destinée aux espoirs. Henri Vandenabeele  et Lennert Van Eetvelt, pourtant arrivé en dernière minute dans la sélection en raison d’une blessure au genou de Louis Blouwe, ont mené les grandes offensives dans les quatre derniers tours avec une idée en tête : avoir toujours un coureur belge aux avant-postes pour jouer le titre. La manœuvre était audacieuse, mais elle permettait à leurs équipes de rester dans les roues, en poursuite. Van Eetvelt parvenait même à s’isoler en tête dans l’avant-dernière montée de Povo, avant de faiblir dans l’ultime ascension, un tour plus loin. Les Italiens Filippo Zana et Filippo Baroncini revenaient alors sur le coureur belge avec le Hongrois Erik Fetter et l’Espagnol Juan Ayuso, soit les grands favoris du jour. Mais d’un effort explosif, Thibau Nys sortait du dernier virage pentu en danseuse pour rentrer au dernier moment, avant la descente vers Trento.

Dans l’équipe belge, la consigne était alors claire : tout pour Nys ! “Il fallait évidemment jouer sa carte”, admet même Van Eetvelt après coup. “Il est très rapide et il fallait en tenir compte. Je ne pouvais de toute façon pas gagner, j’avais déjà produit mon effort”. Le neuvième du chrono se mettait alors à plat ventre pour son équipier limbourgeois, fils de l’ancien champion du monde Sven Nys. Thibau Nys en profitait dans les deux derniers virages pour passer à l’avant et lancer son sprint en force. Le voici champion d’Europe espoir sur route, moins d’un mois après sa deuxième place sur le championnat de Belgique espoir. Et surtout près de huit mois après sa lourde déception d’une non-sélection avec les espoirs belges au championnat du monde de cyclo-cross. “J’étais nerveux, car je sentais que j’étais à la limite des crampes dans le final. J’ai finalement senti que j’étais le plus rapide. Et cela s’est bien terminé”, confirme le coureur belge de 18 ans, en larmes avant de monter sur le podium.

Déjà sous le feu des projecteurs avec son papa (il fait notamment l’objet d’un documentaire annuel pour la VRT), Thibau Nys confirme désormais ses prétentions sportives, avec l’espoir de faire aussi bien dans deux semaines au championnat du monde. “Mon objectif est déjà atteint. Tout ce qui arrive maintenant est du bonus”, précise-t-il. Ce titre changera-t-il toutefois son avenir entre le cyclo-cross et la route ? “Peut-être à l’avenir, mais ce ne sera pas pour tout de suite. J’aime toujours le cyclo-cross”, lance-t-il. “J’ai encore le temps devant moi, c’est à mon avantage”. Une carrière à la Wout van Aert ou Mathieu Van der Poel n’est donc pas encore sur la table : Thibau Nys a bien raison de profiter actuellement de ses réussites, et d’attendre ces prochaines saisons avant de choisir un programme à la demande.

Résultats de la course des espoirs hommes (133,6 km) :

  1. Thibau Nys (BELGIQUE) en 3h06:57
  2. Filippo Baroncini (Italie)
  3. Juan Ayuso (Espagne)
  4. Erik Fetter (Hongrie)
  5. Lennert Van Eetvelt (BELGIQUE)
  6. Filippo Zana (Italie)
  7. Louis Barré (France) à 0:04
  8. Marijn van den Berg (Pays-Bas) à 0:19
  9. Jakub Toupalik (République tchèque)
  10. Tobias Bayer (Autriche)
  11. Stan Van Tricht (BELGIQUE) à 1:31
  12. Henri Vandenabeele (BELGIQUE) à 4:09
  13. Jenno Berckmoes (BELGIQUE) à 6:00
  14. Toon Clynhens (BELGIQUE)

Juniors : les étoiles pour Grégoire, avant le WorldTour

Sur une course de plus de 100 kilomètres, la victoire s’est jouée dans le dernier tour parmi les juniors. Le grimpeur-rouleur belge Cian Uijtdebroeks, l’un des favoris sur ce tracé, a tenté sa chance au début de la dernière ascension de Povo, avant de voir le podium s’envoler, avec les offensives des Français Romain Grégoire et Lenny Martinez et du Norvégien Per Strand Hagenes. Le trio s’est entendu malgré la suprématie numéraire des Français, et a pu se disputer la victoire au sprint. Avec une victoire de Romain Grégoire, l’autre favori du jour après ses récents succès sur le championnat de France (contre-la-montre et course en ligne), l’exigeant Ain Bugey Valromey Tour ou le tout aussi relevé Trophée Dorigo. À tel point que selon des sources bien informées chez Wielerflits, le nouveau champion d’Europe junior, âgé de 18 ans, devrait directement rejoindre les rangs professionnels chez Ag2r Citroën Team, après une seule saison chez Ag2r Citroën U19.

Derrière le trio de tête, l’équipe belge a enchaîné les relais pour rentrer, mais le sprint n’a pu se jouer que pour la quatrième place. Vlad Van Mechelen, 17 ans, remporte ce sprint, mais reste évidemment déçu de passer à côté d’une médaille voire du titre. “J’ai regardé derrière moi et j’ai vu un énorme trou. Je ne savais pas si je devais être content ou si la déception était plus grande. Si on était resté groupé, peut-être que j’aurais pu gagner”, avoue-t-il au micro de la VRT. “Ce championnat d’Europe était très compliqué à contrôler. C’est difficile de faire des plans pour tout gérer. À la fin, c’était de l’improvisation. Peut-être qu’on aurait pu conserver des coureurs pour la fin, mais personne ne s’attendait à ce qu’on soit encore autant dans la finale”, réagit encore Van Mechelen, décidé à faire mieux lors des championnats du monde en Flandre.

Résultats de la course des juniors hommes (107,2 km) :

  1. Romain Grégoire (France) en 2h35:42
  2. Per Strand Hagenes (Norvège)
  3. Lenny Martinez (France)
  4. Vlad Van Mechelen (BELGIQUE) à 0:10
  5. Manuel Oioli (Italie)
  6. Jan Christen (Suisse)
  7. Mads Mihkels (Estonie)
  8. Martin Svrcek (Slovaquie)
  9. Alexander Hajek (Autriche)
  10. Sebastian Kirkedam Larsen (Norvège)
  11. Jente Michels (BELGIQUE)
  12. Leander Van Hautegem (BELGIQUE)
  13. Maxence Place (BELGIQUE)
  14. Cian Uijtdebroeks (BELGIQUE)
  15. Alec Segaert (BELGIQUE) à 0:59

Photo : capture Eurosport

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