La tension, c’est ce qui fait, malheureusement pour certains, le sel de la première étape du Tour de France. Il faut savoir se placer, comprendre comment le peloton fonctionne, se faufiler dans des espaces qui semblent parfois trop petits pour un guidon, et foncer à plus de 60 km/h dans les derniers kilomètres. Mais tous les coureurs ne sont pas des acrobates et cela s’est vu sur cette première étape : des chutes, un sprint chaotique et un vainqueur surprenant.
Nerveux au départ
Cette nervosité inhérente à l’ouverture de ces trois semaines de course se ressentait déjà au départ, non loin du Palais royal. Dans les coulisses, les contrôles de sécurité ont été multipliés et la moindre accréditation scrutée pour s’assurer que seules les personnes autorisées peuvent désormais accéder aux bus des équipes ou au podium des signatures. Si le cyclisme reste un sport gratuit et ouvert, l’organisation du Tour de France veut assurer une certaine sécurité aux coureurs, et empêche du coup le public de se promener au gré des bus, comme dans la plupart des autres épreuves. On est loin du Tour d’antan, celui d’Eddy Merckx, honoré comme il se devait pour les cinquante ans de son premier maillot jaune. Au moins, la fête était belle pour ceux qui ont pu se trouver une place devant les barrières placées tout le long du parcours bruxellois. Plus de 100.000 personnes annoncées lors du départ de cette première étape et 500.000 sur toute la Région bruxelloise : le succès populaire est clair et net. Le Tour attire encore les foules.
Nerveux dans l’échappée
Il y avait également foule dans le peloton pour accrocher la première échappée matinale de ce Tour de France. C’est finalement Greg Van Avermaet (CCC) qui poussait tant et plus sur les pédales sur le boulevard Mettewie, à Molenbeek, pour creuser l’écart avec Xandro Meurisse (Wanty-Gobert), Mads Wurtz (Katusha-Alpecin) et Natnael Berhane (Cofidis). L’objectif du champion de Belgique était clair : obtenir le maillot à pois sur les pentes du Mur de Grammont, une quarantaine de kilomètres plus loin. Même si Meurisse avait également ce sommet en vue.
“J’étais très motivé pour faire quelque chose sur mes terres”, confie Van Avermaet, finalement en tête au sommet du Mur de Grammont puis deuxième sur le Bosberg. “C’est probablement la seule fois dans ma carrière que le Tour de France inclut le Mur dans son parcours, non loin de ma maison. Ce n’était pas simple d’arriver en tête, même si ça pouvait y ressembler à la TV. Meurisse est un coureur très fort et j’étais inquiet qu’il me déborde. Finalement, j’ai pu franchir le sommet en tête et obtenir le maillot à pois pour ces deux prochains jours. Pour être honnête, j’avais un peu de stress au départ par rapport à cet objectif, mais tout s’est finalement bien passé. Une victoire d’étape, c’est sympa, mais un maillot reste aussi spécial”.
Van Avermaet laissait toutefois filer l’échappée après le Bosberg, deuxième côte répertoriée de la journée, mais le trio de tête ne tenait pas longtemps face au retour du peloton après le secteur pavé de Thiméon, juste après le sprint intermédiaire, suite à l’effort des Bora-Hansgrohe. Un autre coureur tentait sa chance dans les 50 derniers kilomètre : Stéphane Rossetto (Cofidis), en solo pour son premier Tour de France. Le coureur français de 32 ans a donné tant et plus pour tenter de réaliser un exploit quasiment impossible. Mais dans les montées en faux-plat de l’entrée de Bruxelles, dans la commune qui a révélé Eddy Merckx (Woluwe-Saint-Pierre), Rossetto a été avalé, ne pouvant se consoler qu’avec le prix de la combativité.
Nerveux vers l’arrivée
À la poursuite de Rossetto, le peloton a augmenté le rythme, et pour remonter cette longue file, il fallait jouer des coudes sur des routes étroites, aux abords de la capitale. Et dans la précipitation, Jakob Fuglsang (Astana) chutait sur un trottoir, laissant son visage en sang, mais repartant tout aussi vite afin d’éviter toute perte de temps. Le Danois, pour la première fois leader absolu de sa formation, revenait finalement dans les derniers kilomètres, avant de rejoindre l’hôpital pour évaluer ses blessures. Le vainqueur du Critérium s’en sort finalement avec trois points de suture au niveau de l’arcade sourcilière droite et d’une contusion musculaire au niveau du genou. Encore faudra-t-il savoir comment Fuglsang se sentira au départ de la deuxième étape, ce dimanche.
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À près de deux kilomètres de l’arrivée, sur une route rétrécie à l’approche du final, une nouvelle chute mettait une dizaine d’hommes à terre parmi lesquels le sprinter néerlandais Dylan Groenewegen (Jumbo-Visma) et le tenant du titre Geraint Thomas (INEOS). Une sacrée embardée, qui n’était finalement que “légère” pour la plupart des victimes, toutes reparties jusqu’à la ligne. Mais elle confirmait la nervosité et l’envie de tous les sprinters en forme dans ce peloton de se positionner aux meilleures places avant le faux-plat montant annoncé jusqu’au château de Laeken.
Nerveux dans le sprint
Il restait donc ce dernier kilomètre, et ce sprint particulier sur l’avenue du parc royal. Les puncheurs pouvaient encore espérer y trouver la victoire, mais sur cette première étape, tous les sprinters se sentant frais se plaçaient bien aux avant-postes pour bloquer les éventuels audacieux. Et en tête, alors que Peter Sagan (Bora-Hansgrohe) emmenait le gros braquet, les Jumbo-Visma se montraient aux avant-postes malgré la chute de Groenewegen. Et c’est Mike Teunissen qui sortait en force dans les 100 derniers mètres pour aller devancer Sagan de quelques centimètres. “Je ne voyais plus Groenewegen, j’ai entendu qu’il était tombé. On s’est dit que d’un coup, tout le travail fourni était foutu. Mais j’ai essayé de faire le sprint, et je pensais faire un Top 5, ça aurait été déjà bien pour l’équipe. Je n’avais rien à perdre”, explique Teunissen, qui devient ainsi le premier Néerlandais à obtenir le maillot jaune depuis trente ans, et un certain Erik Breukink.
“J’ai vu que Sagan était plus lent que moi, j’ai donc lancé le vélo sur la ligne, mais je ne savais pas qui avait gagné”, continue-t-il à la sortie du podium. “Cette arrivée (en légère montée et avec une chute) me convenait parce que dans un sprint normal, je sais que je n’ai pas de chance. Mais c’est juste fou d’avoir ce maillot jaune. Mais j’espère que Dylan (Groenewegen) pourra sprinter ces prochains jours”, dit encore Teunissen, qui partage justement sa chambre avec… Groenewegen. Il y avait au moins un coureur plus relax que d’autres. C’est celui-ci qui a décroché la victoire, et qui pourra profiter de son maillot jaune ce dimanche à l’occasion du contre-la-montre par équipes dans les rues de Bruxelles.
Résultats de la 1re étape du 106e Tour de France (Bruxelles > Bruxelles, 194.5 km) :
Photo : ASO/Pauline Ballet et Alex Broadway
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