Le Tour de France s’est conclu ce dimanche sur une victoire sans conteste du Gallois Geraint Thomas (Team Sky), troisième coureur britannique et de la formation du même pays à mener le maillot jaune jusqu’à Paris. Si certains annoncent un Tour ennuyeux, d’autres y voient plutôt la spécialisation de certaines équipes qui auraient abandonné le général. Ces trois semaines ont en tout cas offert du spectacle, même s’il n’était pas toujours en vue de la conquête du tricot jaune. Retour en cinq questions sur cette Grande Boucle.
La Team Sky n’a-t-elle plus d’adversaire sur le Tour de France ?
Quand on gagne six des sept dernières éditions du Tour de France, on peut définitivement parler de domination. Le Team Sky est clairement devenu maître dans l’art de la conquête du maillot jaune. D’abord avec Bradley Wiggins, puis avec Chris Froome et Geraint Thomas, l’équipe britannique de Dave Brailsford a construit des bêtes à gagner et une équipe de leaders pour assommer toute concurrence sur chaque édition du Tour de France. Non sans quelques polémiques, non sans quelques affaires qui entachent le cyclisme en général. Mais le palmarès est là et confirme que l’équipe Sky est la plus forte du peloton en ce qui concerne les Grands Tours, ces courses de trois semaines si exigeantes. Est-elle toutefois sans adversaire concret ?
L’équipe Movistar a tenté de réaliser une nouvelle armada pour dompter les hommes en noir et blanc, mais le trio Mikel Landa-Nairo Quintana-Alejandro Valverde, malgré ses quelques offensives, n’a pas convaincu et a plutôt compté sur l’un ou l’autre instant exceptionnel pour faire illusion. Car l’équipe, sinon, a semblé jouer le classement par équipes plutôt que le général. Mais on y reviendra. Ag2r-La Mondiale avait également un bel effectif au départ du Tour mais avec les abandons d’Alexis Vuillermoz, Tony Gallopin et Axel Domont, difficile de durcir la course dans les cols. La Bahrain-Merida s’est retrouvé dans un cas similaire : cette fois, c’est le leader Vincenzo Nibali qui devait quitter le Tour sur chute, à cause d’un spectateur. Sans le Requin de Messine, les Pozzovivo et Izagirre se sont retrouvés bien seuls. Ils restent les équipes néerlandaises, comme la LottoNL-Jumbo qui a amené ses meilleurs grimpeurs sur le Tour et a failli réaliser un podium avec Steven Kruijswijk et Primoz Roglic. Avec une préparation spécifique et quelques années d’expérience, ils pourraient faire mal à la Sky s’ils démontrent le même tempérament offensif que sur ce Tour. Et la Sunweb de Tom Dumoulin aurait également eu plus de gueule avec Wilco Kelderman pour un duo batave à la conquête du maillot jaune. Bref, les rivaux ne manquent pas, il leur faut juste le temps de mûrir ou un peu plus de chance.
Les équipes à huit, une si bonne idée ?
Ce devait être la grande nouveauté de ce Tour de France, mais elle n’a pas vraiment convaincu. Désormais à neuf plutôt qu’à huit, les équipes participantes au Tour ont dû remanier leur équipe pour conserver huit éléments capables d’atteindre directement un objectif fixé. Difficile de jouer plusieurs cartes dans un tel contexte… Le but était d’apporter plus d’animation et de diminuer le nombre de chutes. Concernant les chutes, on ne peut vraiment estimer le nombre de celles-ci, mais de nombreux coureurs ont dû abandonner en raison de celles-ci comme Vincenzo Nibali, Tony Gallopin ou Richie Porte. Et pour les offensives, on repassera. Prenons par exemple Ag2r-La Mondiale qui s’est rapidement retrouvé à cinq et n’a pu lancer de longues offensives comme par le passé. Et la Sky, même à huit, n’a pris que ce dont elle avait besoin pour jouer le général, et a pu facilement contrôler la tête du peloton. L’équipe se permet même de placer encore deux coureurs sur le podium. Bref, les équipes à huit coureurs ne sont pas encore une révolution, du moins pas sur le Tour de France, mais plutôt sur les classiques.
Les classements annexes ont-ils pris le pas sur le général ?
Vu que la lutte pour le maillot jaune semble chasse gardée pour la Sky, beaucoup d’équipes ont visiblement décidé que les classements annexes et les primes qui y sont attachées peuvent permettre à celles-ci de briller sur le Tour de France. L’équipe Bora-Hansgrohe, même si elle avait Rafal Majka dans ses rangs, avait surtout un effectif dédié au maillot vert de Peter Sagan. La Movistar a clairement joué le classement par équipes dans les dernières étapes, comme ce fut le cas ces cinq dernières années. Wanty-Groupe Gobert, spécialiste des échappées, avait aussi pour objectif de terminer en tête du classement par équipes de la journée lors des étapes de plaine, afin d’accumuler les gains. Alors que du côté de Quick Step et de Fortuneo-Samsic, la bagarre pour le maillot à pois a longtemps duré avec deux formations qui n’hésitaient pas à envoyer des équipiers tous azimuts. Vu que le classement général semble inaccessible, certaines équipes ont visiblement décidé d’investir dans ces autres classements qui n’ont pas forcément le même intérêt pour le grand public mais qui rapportent en image de marque. Au grand dam du spectacle pour le classement général. Une réforme de ces classements pourrait à l’avenir permettre de désigner les coureurs les plus réguliers et non plus les coureurs qui visent seulement ces classements, notamment en offrant plus de points sur les derniers cols ou sur les sprints en plaine.
Les coureurs néerlandais sont-ils l’avenir des Grands Tours ?
Cela fait plusieurs années qu’ils tournent autour mais depuis deux saisons, les coureurs néerlandais semblent clairement les grimpeurs offensifs qu’il manque parfois au peloton. Certes, Tom Dumoulin (Sunweb) n’a pas été le grand acteur des attaques de ce Tour, il a toutefois déjà montré qu’il pouvait faire mal à ses rivaux sur le Giro par le passé. Et Steven Kruijswijk (Lotto NL-Jumbo), s’il n’a pu briller sur l’Alpe d’Huez, a été à plusieurs reprises sur le Giro et sur le Tour plus dangereux que ses adversaires pour le classement général. Deuxième et cinquième de cette Grande Boucle, les deux cyclistes du nord peuvent clairement prétendre à la victoire, surtout si leur équipe s’étoffe. Et les avènements d’Antwan Tolhoek chez LottoNL-Jumbo et de Cees Bol chez Sunweb montrent que les talents bataves ne manquent pas pour pousser les leaders vers la victoire.
Les coureurs belges ont-ils vraiment manqué leur Tour ?
Difficile de répondre une seule option. Greg Van Avermaet (BMC) a été parmi les coureurs les plus offensifs du peloton et a porté le maillot jaune pendant dix jours, s’offrant même le premier prix de la combativité réservé à un leader du classement général. Son épopée vers Le Grand-Bornand a confirmé que le champion olympique était capable de s’acclimater à tous les terrains. Il lui a toutefois manqué une victoire d’étape, comme à Roubaix, où il a manqué de justesse face à Degenkolb. Philippe Gilbert (Quick Step) a également tenté à plusieurs reprises, que ce soit dans une échappée ou lors d’une attaque dans le dernier kilomètre, mais sa chute dans la descente du Portet d’Aspet a annihilé toutes ses chances. Il s’en sort toutefois très bien et espère désormais rouler d’ici octobre en compétition. Yves Lampaert (Quick Step) a également tenté sa chance, tombant à chaque fois sur plus fort, alors que Serge Pauwels (Dimension Data) a essayé de s’infiltrer dans une échappée ou l’autre, avant de se fracturer le coude à une semaine du Tour. Pour les autres, la discrétion était assurée : Thomas De Gendt (Lotto-Soudal) a confirmé avoir connu trois semaines difficiles alors que Tiesj Benoot (Lotto-Soudal) a dû renoncer après moins d’une semaine de course. La Lotto a d’ailleurs souligné, par la voix de son manager sportif Marc Sergeant, le mauvais Tour de France réalisé cette année. Alors que la préparation semblait bonne.
Photos : ASO/Alex Broadway et Pauline Ballet