Le Tour des Flandres espoirs disparaît : les moins de 23 ans laissés pour compte ?

Annulé en 2020 et 2021 suite au Covid-19, le Tour des Flandres espoirs n’aura plus lieu à l’avenir. Une décision qui peut paraître surprenante vu les arguments énoncés.

Annulé ces deux dernières années en raison de la pandémie de Covid-19, le Tour des Flandres espoirs n’aura plus lieu à l’avenir, a confirmé l’organisateur Flanders Classics, à nos confrères de DirectVélo. Une décision qui peut paraître surprenante vu les arguments énoncés, notamment concernant la formation des jeunes coureurs.

Organisé depuis 1996, le Tour des Flandres espoirs avait succédé à l’époque au Tour des Flandres amateurs, afin de permettre aux coureurs de moins de 23 ans de poursuivre leur développement sur des routes similaires, mais moins ardues, à l’épreuve destinée aux professionnels. La course a longtemps évolué au gré des départs et arrivées… de l’épreuve professionnelle, proposant tantôt des parcours très vallonnés, tantôt des finales plus accessibles aux sprinters. Nick Nuyens, Giovanni Visconti ou encore Kevyn Ista s’étaient imposés à l’époque de l’arrivée tracée à Meerbeke, dans les années 2000. Plus récemment, autour d’Audenarde, Dylan Groenewegen, Alexander Edmondson ou encore Eddie Dunbar avaient trouvé la victoire sur une course plus plane.

Mais après une dernière édition organisée en 2019 et remportée par le Danois Andreas Stokbro (aujourd’hui pro chez Qhubeka-NextHash), l’organisateur Flanders Classics a annoncé au site DirectVélo que cette classique, destinée aux moins de 23 ans et disputée lors de la Coupe des Nations de l’Union Cycliste Internationale (UCI), ne reviendra pas au calendrier. Wim Van Herreweghe de Flanders Classics affirme notamment que le Tour des Flandres espoirs tombe « à une mauvaise date », à savoir le dimanche suivant le Tour des Flandres professionnel et le même jour que Paris-Roubaix. « Pour la ville d’Audenarde, c’est compliqué d’organiser deux grands événements en deux semaines », précise-t-il. Avant d’ajouter un argument étonnant : « Nous ne sommes pas insensibles au fait que nous voyons de plus en plus de juniors sauter la catégorie espoirs » pour rejoindre directement la catégorie professionnelle.

Le professionnalisme à son paroxysme

Certes, les exemples de juniors évitant la catégorie espoirs sont légion ces dernières années entre Remco Evenepoel, Quinn Simmons ou encore Cian Uijtdebroeks. Mais ces exemples sont loin de représenter une majorité. Ils sont plutôt hors-normes face à d’autres sportifs qui ont parfois besoin d’une à deux saisons de transition pour franchir un nouveau palier et enchaîner des courses de plus de 150 à 200 kilomètres, sur toute une saison (toujours plus longue, de janvier à octobre). La maturité physique chez les cyclistes se confirme autour de 27 à 30 ans et ces années sur des épreuves exigeantes, mais moins longues ou dans un calendrier moins chargé, permettent à ces espoirs de se construire une base d’endurance assez solide pour enchaîner les saisons chez les professionnels.

« Combien de coureurs passent pro à 18 ans ? À moins d’être un surhomme, c’est quand même limité. Un coureur a besoin de temps pour apprendre son futur métier », rappelle Jean-Pierre Delitte, organisateur du Triptyque des Monts et Châteaux, autre épreuve de référence pour les espoirs, à DirectVélo. Arnaud De Lie, grand espoir wallon qui passe pro chez Lotto-Soudal en 2022, ne dit pas autre chose à la RTBF, en juillet dernier : « Il fallait que je fasse d’abord des courses chez les U23 pour voir si ça marchait bien. J’ai commencé avec de bons résultats et j’ai senti que j’étais prêt mentalement et physiquement pour passer ce cap ». Selon le coureur originaire de la province du Luxembourg, vainqueur de 10 courses en 2021 pour sa première et unique année avec les espoirs, « on travaille avec de nouvelles techniques d’entraînement. On est déjà beaucoup plus suivis que par le passé et c’est pour cela qu’on arrive compétitif chez les professionnels ». Selon Cian Uijtdebroeks, cette arrivée de juniors parmi les pros est aussi due à la technologique actuelle : « L’approche du vélo a beaucoup changé ces dernières années. Les entraînements sont désormais définis par les watts. Pour résumer, quand on roule, on regarde juste notre compteur… et cela, dès les catégories de jeunes. Il faut aimer, ça, ce n’est pas uniquement pédaler pour le fun, pour le plaisir », estime le Limbourgeois, futur pro chez Bora-Hansgrohe, dans la DH.

Un calendrier fourni, mais…

Mais les talents qui en ressortent ne sont pas majoritaires, loin de là. C’est d’ailleurs pour cela que bon nombre d’équipes WorldTour proposent une équipe de formation, comme la DSM, Groupama-FDJ, Lotto-Soudal, BikeExchange ou encore Jumbo-Visma. La catégorie destinée aux espoirs offre toujours un calendrier intéressant avec une quarantaine de courses annoncées pour les moins de 23 ans dont la Kattekoerse (Gand-Wevelgem espoirs), Paris-Roubaix espoirs, Liège-Bastogne-Liège espoirs ou encore le Baby Giro, le Tour d’Italie espoirs. Et les coureurs de moins de 23 ans passant professionnel après ce passage intermédiaire restent nombreux : Paret-Peintre chez Ag2r Citroën, De Lie chez Lotto-Soudal, Askey chez Groupama-FDJ, Jones chez Israel Start-up Nation, Vandenabeele chez DSM, pour ne citer qu’eux en 2022.

Il reste une question autour de cette catégorie, nécessaire pour le développement des coureurs : quid de la participation au Tour de l’Avenir ? Actuellement, cette épreuve considérée comme la plus prestigieuse du calendrier, sorte de mini-Tour de France, propose à l’ensemble des coureurs de moins de 23 ans de s’inscrire au départ. Comme sur les championnats du monde pour les espoirs. Cela mène à des pelotons avec des coureurs de moins de 23 ans aux niveaux bien différents entre ceux qui s’entraînent toute l’année avec leurs confrères espoirs et ceux qui ont déjà enchaîné les courses WorldTour parmi les pros. Cela ne garantit pas de la victoire, comme le Norvégien Tobias Johannessen, actif chez Uno-X, l’a confirmé en septembre dernier. Mais ces différences pourraient mener à terme à une dévaluation d’une catégorie utile pour l’avenir du cyclisme moderne.

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Photo : Le Danois Andreas Stokbro restera le dernier vainqueur du Tour des Flandres espoirs, en 2019 – Capture Proximus Sports

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